26 août 2014

Cyrano de Bergerac – ‘La mort d’Agrippine’ - « Frappons, voilà l’Hostie ». De cape et de crocs au voyage dans la lune...

Cyrano de Bergerac

" Frappons, voilà l’Hostie " est une fameuse réplique qui contribua, entre autre chose, au scandale suscité par la tragédie de Cyrano de Bergerac, intitulée " La mort d’Agrippine "(1). La pièce, on s’en doute, ne fera pas long feu, et ces " belles impiétés " furent retirées de l’affiche après seulement quelques représentations.

L’auteur du " Voyage dans la lune ", habile bretteur devant l’Eternel, pour ce délicieux blasphème joue sur l’étymologie ; le latin hostia, la victime sacrifiée (2), ayant radical semblable à hostire, signifiant frapper. Ainsi l’hostis représente cet ennemi qu’il nous faut occire… Frappons donc !

Quant à la trame de l’histoire, on peut ainsi le résumer : Agrippine, veuve de Germanicus, lui même fils adoptif de l'Empereur Tibère, cherche à venger la mort de l'homme qu’elle a aimé. Mais au plus haut niveau de l’Empire Romain, ce n’est qu’un nid de guêpe ; chacun trahissant chacun… Dans l’entourage de la Dame, gravite bien des ambitieux, tel Séjan favori de Tibère, drôle d’Epicurien n’aspirant qu’à prendre sa place sur le trône, avec, bien évidemment la belle Agrippine à son bras.
De ces intrigues et autres sordides complots, ne sortiront que sang et larmes…

La Mort de Germanicus - Nicolas Poussin -1626
Séjan, ou Séjanus, puisque c’est le seul protagoniste de ce drame dont le nom n’a pas été francisé, est un drôle de soldat d’Epicure ; cet homme aux noirs desseins qui, pétrit des vers de Lucrèce, se trouve malgré tout en quête d’honneurs, de renommée et de gloire. Il n’empêche, la pièce, machiavélienne par bien des aspects, est un virulent plaidoyer athée mâtiné d’épicurisme d’où suinte un libertinage de pensée des plus radical.
  
Il n’en fallait pas davantage pour se prendre d’envie à savourer cette œuvre trop méconnue de l’auteur du " Voyage dans la lune " (L’autre Monde ou les Etats et Empires de la Lune).

Aussi, en guise de préliminaires, ne résistons point à ouïr Séjanus se faire, en ces quelques vers sublimes, le porte parole d’Épicure :

J'ai beau plonger mon âme et mes regards funèbres

Dans ce vaste néant et ces longues ténèbres,
J'y rencontre partout un état sans douleur,
Qui n'élève à mon front ni trouble ni terreur ;
Car puisque l'on ne reste après ce grand passage
Que le songe léger d'une légère image,
Et que le coup fatal ne fait ni mal ni bien,
Vivant parce qu'on est, mort parce qu'on est rien ;
Pourquoi perdre à regret la lumière reçue,
Qu'on ne peut regretter après qu'elle est perdue ?   


… "







(1) Pièce jouée en 1653 sur la scène du Théâtre de Bourgogne. Probablement écrite aux alentours de 1647.
(2) per hostias dis supplicare, Salluste. J. 63, 1 (faire un sacrifice aux dieux). 

   
Pour une biographie de Cyrano : 


Pour les adeptes et habitués de lecture en ancien Français, l’ouvrage est disponible sur le site de la BNF à cette adresse :   
   

 Site de l’une des dernière éditions (l’ouvrage existe aussi en version poche) :

  

Site consacré à Cyrano de Bergerac ; à propos de la pièce :    


Autre lien vers " La mort d’Agrippine " :  
  

Une magnifique BD série qui s’est largement inspirée de Cyrano ; il s’agit de Cape et de Crocs " :  



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