Billet initial du 12 avril 2013
(Billet initial supprimé de la plateforme overblog, infestée désormais de publicité)
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L’ambitieux et l’intriguant sans scrupules avancent
par tous les vents ; l’homme de principe reste dans des postes
subalternes.
(Le propre de) l’homme juste est de ne pas vouloir
gouverner tous les autres, et de se gouverner seulement lui-même.
L’art du politique est de refuser en détail ce qu’on
a promis en gros.
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Etienne Chouard a dit tout le bien qu’il pensait de l’essai d’Alain, Propos sur les pouvoirs, recueil de petits textes datés entre 1908 et 1936 (selon mon recensement). Cela a suffit pour me donner envie d’y regarder de plus près, d’autant que jusqu’ici je n’avais rien lu de ce philosophe dérouté et déroutant – ce qui est agaçant à propos d’un penseur qui paraît toujours au cœur des problématiques contemporaines.
Il était fatal, en ce genre d’exercice de compilation, que se trouvât sous le chapeau de ces Propos sur les pouvoirs du bon et du moins bon. Du fulgurant et du pesant. Du lumineux et du sirupeux. Du véritable et du contestable…
Mais quoi qu’on puisse en penser sur le fond, il est indubitable que dans ces paragraphes, rassemblés par thèmes, se trouve toujours matière à penser – gardons-nous toutefois des transpositions trop littérales.
La fonction de chef ne relève pas de la compétence
« (…)
Je lisais récemment qu’un grand inventeur des télégraphes venait de mourir, avec une toute petite retraite. Je me demandai au premier moment : ‘Comment n’était-il pas chef de service ?’ La réponse est aisée à trouver. Il savait le télégraphe, non les passions. Comment aurai-t-il pu recevoir des solliciteurs , deviner ce qu’ils ne disaient pas, apercevoir leurs desseins cachés, peser leur ambition ; reconstruire leur ménage, évaluer leurs dettes, flairer leurs alliances, leurs cousinages, et jusqu’aux protecteurs de leurs femmes ; et en même temps se cacher à eux, dissimuler, feindre un vif intérêt pour des choses de peu, accueillir d’un air glacé les révélations inattendues ; parler enfin pour ne rien dire, insinuer et nier, laisser entendre et ne rien faire entendre, user la faim de l’adversaire en lui jetant des possibles inextricables ; le renvoyer content et mécontent, irrité pour de nouveaux griefs, et oublieux des anciens ; et en somme opposer une passion à une autre, et coupler les désir comme des chiens, afin de les tenir sans trop tirer sur la corde ? Tout cet art n’a aucun rapport avec la connaissance des courants électriques et des signaux distincts courants en même temps sur le même fil.
Je dis même que les deux sciences ne vont guère ensemble. Car l’inventeur est un ingénu, qui pense tout haut ; ses idées sont plus fortes que lui. Au contraire, à vouloir faire taire les idées, on les endort. Le vrai diplomate est celui qui ne pense rien. De là un choix inévitable des médiocres pour la plus haute direction ; je dis des médiocres dans la science même. Par exemple, je suis sûr que le directeur des télégraphes est médiocre en science télégraphique ; le directeur de l’Observatoire, médiocre en science astronomique ; le directeur de la mutualité, médiocre en science économique. Mais tous sont supérieurs dans l’art de tromper. »
Deux dernières, tiré du chapitre : Obéir mais ne pas respecter
Le tyran se reconnait à ceci qu'il veut avoir raison. (...) Le chef veux persuader; mais en même temps qu'il argumente, il fait sentir, par le ton, que ses arguments sont, à ses yeux, sans réplique.
Chacun a pu entendre de ces petits rois (...) qui voudraient toujours dire : "je ne vous donne point d'ordre; je vous dis seulement mon avis; et je désire que vous vous y rangiez, et que la décision vienne de vous". Et ils appellent très bien "mauvais esprit" celui qui répond fort poliment : "Mon esprit n'est point une chose à vous; si vous voulez être approuvé, donnez vos raisons (...); mais si vous voulez être obéi, ayez le courage d'ordonner.
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