Cimetière de Joal-Fadiouth (Photo par Mélanie) [cliquer pour grand format] |
A l’heure du retour des fanatismes
religieux de tous poils et des replis identitaires, il n’est pas mauvais de
faire un détour par Joal-Fadiouth… Une balade parmi les coquillages, le soleil,
les palétuviers et les baobabs ; sans oublier son cimetière fameux avec ses
croix plantés sur les ondulations du paysage. Un lieu hors du temps ; colline
paisible enroulée autour de son axe, un calvaire signant la particularité
de l’endroit. Car la commune est une enclave catholique plantée au cœur des
terres musulmanes.
Fadiouth (Photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Allant à la messe.... (photo par Axel) [Cliquer pour grand format] |
A y déambuler, sur le pont à marée
basse, au-dessus des crabes violonistes, courant la mangrove on se prend à savourer
le silence ; cette paix que procure la bannissement des véhicules à moteurs
– relégués loin de là, sur terre ferme. Passe une aigrette des récifs ;
des enfants qui jouent pieds dans l’eau, sans se préoccuper des porcs cherchant
pitance dans la vase. Une pirogue s’étire et baille dans la lagune… Et dans les
allées étroites du village, croiser une pénitente pressées ou cette autre
altières dans le vêtures colorées. Beauté que rehausse l’or de son poignet… Car
se profile tout près de là une singulière procession ; colonne du matin au
pas cadencé, regroupée à la
file indienne derrière son crucifix. Les femmes au-devant,
moniales parée de blanc immaculé. Suivent les prêtres et leurs étoles,
suspendues à leur cou comme le joug d’un bétail de labour, d’un vert couleur de
saison… Car c’est l’heure de la messe à l’église Saint-François-Xavier.
Crabe violoniste (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Ce lieu
de culte reconstruit à la fois par des mains chrétiennes et musulmanes, après sa
mise à bas par l’ouragan Cindy à l’orée du nouveau millénaire. Eglise symbole
donc, insigne de la tolérance religieuse locale résidant entre les deux
communautés monothéistes… « Chrétiens
comme musulmans, nous sommes allés chercher du sable. Chrétiens comme musulmans
nous avons fait de l'église une affaire qui est la nôtre, donc l'affaire de
tout Fadiouth… », confessera l’heureux abbé de la paroisse.
Pressée... (Photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Procession.... (Photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Saint François Xavier.... (Photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Pont vers le cimetière (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Planté face à l’océan, au mitan
du Sénégal, à l’extrémité de la Petite-Côte, Joal-Fadiouth est ainsi l’association
de deux villages : Joal, bâti sur une mince langue terre ferme, et Fadiouth,
située dans l’œil de l’estuaire, sur une île artificielle constituée d’un
amoncellement de coquillages, reliée au pays par un pont piétonniers de 800 m
de long. De là, une seconde passerelle conduit au cimetière. Ce lieu de villégiature
des morts, sis au milieu des mangroves, et ou il fait bon se promener parmi les
tombes… Y cohabitent les trépassés du Christ avec une poignée de fidèles de Muhammad. A
la saison des pluies les coquillages se tapissent de vert… Les crabes pullulent
et la vie s’ébroue.
Cimetière de Joal-Fadiouth (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Vue de Fadiouth depuis le cimetière (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Vers la mangrove... (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
Joal est aussi le lieu de naissance du père de la négritude, LéopoldSédar-Senghor.
Qui abandonnera au vent ce poème…
Je me
rappelle.
Je me
rappelle les signares à l'ombre verte des vérandas
Les signares
aux yeux surréels comme un clair de lune sur la grève.
Je me
rappelle les fastes du Couchant
Où Koumba
N´Dofène voulait faire tailler son manteau royal.
Je me
rappelle les festins funèbres fumant du sang des troupeaux égorgés
Du bruit des
querelles, des rhapsodies des griots.
Je me
rappelle les voix païennes rythmant le Tantum Ergo
Et les
processions et les palmes et les arcs de triomphe.
Je me
rappelle la danse des filles nubiles
Les choeurs
de lutte - oh ! la danse finale des jeunes hommes, buste
Penché
élancé, et le pur cri d'amour des femmes - Kor Siga !
Je me
rappelle, je me rappelle...
Ma tête
rythmant
Quelle marche
lasse le long des jours d´Europe où parfois
Apparaît un
jazz orphelin qui sanglote sanglote sanglote.
(Léopold
Sédar Senghor, Chants d’ombre, 1945)
Jouer dans l'eau... (photo par Axel) [cliquer pour grand format] |
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