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Vue générale de Cluny, depuis la cour (photo par Axel) |
Depuis Lyon, où il fait si bon vivre, se laisser
couler en Bourgogne...
Après quelques lacets, dans un paysage tout en
ondulation ou filent impassibles les milans royaux, grimper le coteau ou se
perche la forteresse de Berzé-le-Châtel, au cœur du vignoble mâconnais. De là,
après de paisibles déambulations, détour oisif parmi les tours médiévales,
descendre sur Cluny. Sans hâte…
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Château de Berzé-le-Châtel (photo par Axel) |
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Dans l'ecclesia (photo par Axel) |
Alors profitons de l’occasion donnée par la
découverte toute récente d’un trésor pour évoquer en quelques mots l’abbaye siégeant
au cœur du bourg éponyme.
Anne Baud, archéologue du fait religieux (médiéval),
nous raconte comment,
presque par hasard, elle découvrit une « enveloppe en tissu contenant plus de 2000 deniers clunisiens, et dedans
il y avait un autre petit sac en cuir qui contenait des pièces d’or, 21 dinars
d’or, plusieurs feuilles d’or pliées et une magnifique bague sigillaire (qui
fait des sceaux)…
(…) On a 2113
deniers clunisiens, avec 150 oboles (une obole = la moitié d’un denier), c’est
extrêmement rare, il y’en a très peu en circulation et puis on a 6 autres
deniers qui proviennent d’ailleurs (2 de Meaux, 1 de Bourgogne 2 aussi de Louis
VII roi de France). »
La découverte est d’autant plus extraordinaire,
qu’au-delà des circonstances fortuites de la trouvaille, c’est la première fois
qu’on exhume un tel trésor in situ,
dans une abbaye médiévale ; c’est-à-dire à l’endroit même où on l’a déposé,
et non dans un remblai ou un champ…
A Cluny se mêlent des ambiances diverses…
Des restes de constructions médiévales étalées sur
plusieurs siècles, fabuleuses d’audace et nimbées de majesté étrange, côtoient
des bâtiments d’époques plus récentes à l’austérité plâtreuse. Choc des styles,
ou l’on devine ou va la préférence du narrateur.
Cluny est la plus grande abbaye de l’occident
chrétien. Fondé en 910 par Guillaume d’Aquitaine, le complexe sera déclaré en
955 « Monastère, bourg et place forte ».
Sa particularité est de ne dépendre en rien du roi de France.
Monastère bénédictin, Cluny suit au plus près la
règle de Saint Benoit, qui essaimera ensuite pour former l’ordre clunisien. Et des douze moines
fondateurs en 910 on en retrouvera, deux siècles plus tard, pas moins de
10.000, répartis dans pas loin de 1500 places européennes. Il y aurait tant à
dire… Mais cela dépasserait largement le
cadre de ce modeste billet, dont l’objet est de susciter le pas de côté.
Déambuler sous les voutes du grand transept, ou ce
qu’il en reste, fait sentir au badaud toute sa petitesse. Irisé de lumière le
colosse de pierre étire les 25m de son squelette – une colonne vertébrale qui
en mesurait 80 à l’origine ; avant que la Révolution ne lui fasse sentir
que tout passe ! En effet, en 1791, alors qu’ils ne sont plus qu’une
douzaine à hanter les lieux (retour aux sources), les moines célèbrent une
dernière messe, alors que le pillage a déjà commencé. Et, en 1798, pour
parachever l’œuvre de destruction l’endroit sera déclaré carrière de pierres à
ciel ouvert. Parmi les fossoyeurs, un curé défroqué, comme il se doit…
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Cloître de Cluny (photo par Axel) |
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Sous les voutes de Cluny... (photo par Axel) |
Mais remontons un instant le temps pour nous
arrêter fin 1141, l’année ou Abélard, poursuivi par la vindicte de Bernard de
Clairvaux, ce fauteur de croisades et mortificateur en chef, trouvera refuge et hospitalité à la major ecclesia, l’église de Cluny étant
à cette époque la plus vaste de la chrétienté (elle le restera jusqu’à la
construction, au XVIe, de St Pierre de Rome). Condamné en juillet, Abélard fort
diminué par l’âge et la maladie, à l’intention de faire appel du jugement
auprès du souverain pontife à Rome. Il n’y parviendra pas, et mourra en
avril 1142 au prieuré Saint-Marcel, rattaché à Cluny. Ses frères lui érigeront
un tombeau monumental dans l’abbatiale même.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là et je cède la
parole à mieux informé que moi :
La suite des péripéties, qui s’étaleront jusqu’en
1801, est à lire sur le site Tombes et sépultures.
Mais avant de quitter Cluny, visitons la chapelle
Jean de Bourbon, monument de poupée, exquis et singulier par ses mesures ;
bonzaï de pierre où il fait bon se perdre à l’écart des foules, en ces jours
propices de fin d’après-midi lorsque le soleil, invisible s’essouffle au-dessus
de la ville.
Et juste avant de rebrousser, passons par le
bâtiment du Farinier avec sa charpenter en berceau, vaisseau retourné, daté des
années 1275. Et songer que l’histoire de Cluny remonte bien au-delà du
Moyen-Age, et que parmi les décombres fut retrouvé un four antique ; témoin
d’une continuité d’occupation depuis les époques les plus reculées.
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Facéties en la Sainte Chapelle... |