18 avr. 2015

Yala national park – Entre crocodiles paons sauvages et martin pêcheurs

YALA NATIONAL PARK


La fille de votre serviteur dans son véhicule

A l’évocation du mot safari, d’aucun s’imaginent volontiers une ambiance à la Hemingway, le fusil en moins ; d’autres y substitueront avec profit les langueurs tragiques de La ferme Africaine chère à Karen Blixen ou encore ces Racines du ciel, perchées dans le sillage de l’irascible et non moins fantasque Morel à qui on demanda un jour (on notera le style journalistique de la question) :

-          « Voilà plusieurs mois que vous tenez le maquis. Comment expliquez-vous la facilité avec laquelle vous avez toujours échappé aux autorités ? »
-           
Et l’aventurier de s’esclaffer avec bonhomie :

-          « Tout le monde me veut du bien !… »
-           
Un peu court pour l’autre qui s’entête – il veut comprendre :

-          Vous avez blessé des chasseurs, brûlé des fermes. Mais vous n’avez jamais tué personne. Est-ce un hasard ?
-          J’ai visé de mon mieux.
-          Pour éviter de tuer ?
-          On n’apprend jamais rien à un gars en le tuant… On contraire, on lui fait tout oublier. Hein ? »
(P347)


Autre temps autre mœurs, encore que le braconnage contemporain en certains endroits de la planète a pris les allures d’une véritable guerre.  Mais là où sévissent les armes lourdes on n’emmène d’ordinaire pas les touristes – et sans doute rate-t-on là une occasion d’une véritable confrontation ludique …
Mais c’est une autre histoire.


Dans les pas du rêveur

Entrée de Yala (Photo par Axel)
Il faut s’imaginer le bivouac à l’aube ; réveil parmi les bêtes aux cris fantastiques dans la brousse…  Assis sur une souche, un scotch à la main à contempler au loin les animaux se succéder par ordre de préséance au marigot – vision romantique, sans doute.  
La réalité d’aujourd’hui est plus triviale, moins chargée de poésie…  Même si, sur le départ d’un mince périple dans la savane, alors que la nuit résiste encore, un pincement au cœur habille la fatigue d’un sourire inconsolé…
Certes le Sri Lanka n’est pas l’Afrique, mais tout de même… La faune y est riche (on y recense pas moins de 86 espèces mammifères, dont l’éléphant et le léopard) et s’y love de belles réserves naturelles ; parmi elles, en bonne place : Yala national park.

Prémisses (aux abords de Yala)


Priyankara hotel, à Tissamaharama (photo par Axel)

Martin-chasseur de Smyrne (photo par Axel)
Pour se mettre dans l’ambiance rien de mieux qu’une résidence située sur les franges du parc. Ainsi Priyankara hotel, à Tissamaharama situé juste au sud de la réserve. Villégiature à savourer le crépuscule venu, lorsqu’expire le ballet des martins pêcheurs (trois espèces s’y côtoient familièrement) (1) et qu’au loin se pressent au dortoir des troupes de tantales indiens ou de pélicans. C’est parfois un pygargue à ventre blanc qui surgit dans les nues essorées de soleil, houspillé par des corbeaux au courage à géométrie variable.

Parfois le cri si caractéristique d’un paon perce le marais, distillant un parfum d’exotisme ténu.
Plus proches, alors que la nuit s’installe, trainées vertes filant à toute allure les escadres de perruches à colliers défient les premières ténèbres… 


Depuis l'hôtel (photo par Axel)
Il ne restera plus alors qu’à s’installer au bar, un cocktail à la main, à regarder les insectes s’escrimer jusqu’au trépas avec les billes de lumières éparpillées dans les couloirs des nonchalances tropicales.


Into the wild



Sur un sentier, dans le parc... 
Les jeeps emplies de leurs contingents d’excursionnistes du dimanche, lèvent la poussière de l’unique piste menant à l’entrée de la réserve de Yala proprement dite. A fur et à mesure de l’approche des portes, le convoi se gonfle de nouveaux groupes, jusqu’à former une colonne presque ininterrompue de véhicules.  C’est ici que l’on prend conscience de l’impact du tourisme (plus de 150.000 visiteurs en 2002, avant une retombée pour cause de guerres civiles).  
Nous nous croyions seuls au monde et nous voici légion…   
   
Une fois acquitté le droit d’entrée, sous un ciel rouge sang incendiant les nuages le cortège reprends. La piste brun rougeâtre cernée par un désert de broussailles s’enfonce dans le parc, les sentiers bifurquent bientôt, les groupes éclatent, se retrouvent, s’agglomèrent, avant de se perdre à nouveau. Mais pour l’heure point d’horizon, juste les traines de quelques paons surpris perché sur des dortoirs improvisés. La nature qui se réveille.
Tantales, aigrettes & pélicans (photo par Axel)
L’expérience s’avère déceptive de prime abord ; cette impression de foule, ce manque de perspective y contribuent. Entre le réel et le fantasme une sorte de gouffre – ce pourquoi il proprement bon de ne s’attendre à rien !

Survient le premier trou d’eau. Premières rencontres. Des spatules blanches en nombre, accompagnées de tantales indiens. Au loin une poignée de buffles, indifférents. Et soudain, dans l’eau, l’ondulation d’un crocodile, puis un autre encore, sans compter celui assoupi sur la berge, d’aspect énorme ; un sourire figé, faussement enjôleur. Une fois l’œil exercé et les premières fébrilités passées, on se rend compte de l’importance de la population de sauriens. Un nombre qui ne parait pas émouvoir les oiseaux. Parmi eux des grandes aigrettes, des pélicans frisés, des hérons cendrés ou des échasses. Ici, un tantale rechigne même à laisser le passage au roi du marigot.


Crocodile (Photo par Axel)
Pour situer Yala d’une manière un peu plus objective :   
   
“Yala combines a strict nature reserve with a national park. Divided into 5 blocks, the park has a protected area of nearly 130,000 hectares of land consisting of light forests, scrubs, grasslands, tanks and lagoons. Two blocks are currently opened to the public.
Situated in Sri Lanka’s south-east hugging the panoramic Indian Ocean, Yala was designated a wildlife sanctuary in 1900 and was designated a national park in 1938. Ironically, the park was initially used as a hunting ground for the elite under British rule. Yala is home to 44 varieties of mammal and 215 bird species.”

Tourterelle (photo par Axel)
Yala abrite donc 215 espèces d’oiseaux.  Ici  une tourterelle tigrine, là une nuée verte et orange de colombars à double colliers, dont le ballet à de loin l’allure d’une troupe de petits perroquets. C’est aussi des paons en nombre, des coqs sauvages, ce qui ajoute à l’étrange à l’œil occidental. Il faudrait bien plus qu’une journée, bien mieux qu’une ruée en meute, où l’intérêt se porte plutôt sur les mammifères emblématiques du parc  - ce qu’ont bien compris les guides. Mais, voué à l’éternelle insatisfaction,  l’on s’accommode de ce que l’on a.


Paon, Vanneau, Martin-pêcheur, coq & tourterelles (photo par Axel)

Guêpier (photo par Axel)
Parmi les habitués du parc, le guêpier d’orient ou l’aigle huppé. Avec un peu de chance on croisera aussi, dans les secteurs côtiers le singulier Œdicnème des récifs, limicole au profil caractéristique.


Œdicnème des récif (Photo par Axel)
Le secteur boisé se compose quant à lui essentiellement du bloc I du parc et de milieux ouverts de pâturages et de prairies.

Mais le sentier s’incline désormais vers la mer. C’est que le petit déjeuner des aventuriers d’un jour a traditionnellement lieu non loin de Patanangala, un affleurement rocheux magnifique situé sur la plage de Yala. C’est là que se regroupent les véhicules, à l’ombre. Il est alors bon de s’éloigner vers le rocher, sans oublier de visiter les trous d'eau, lagons et mangroves…


Dans le parc... (photo par Axel)

Paon (photo par Axel)

A l'approche du rocher (photo par Axel)

Rocher de la plage de Yala (Photo par Axel)
A Yala chacun en son for intérieur espère croiser un léopard. C’est en effet dans cette réserve que l’on trouve l’une des plus grandes densités de ces félins au monde. Alors on guette. Ici les singes donnant l’alerte, là un groupe de daims prenant subitement la fuite. Mais la rencontre avec le seigneur des lieux demeure hasardeuse. D’ailleurs les statistiques locales, de 1 léopard au km2, reflètent plutôt un biais pour attirer les touristes. La réalité se situerait aux alentours de 0,18 individus au km2, ce qui reste exceptionnel.
Dans ce sanctuaire animalier on rencontrera par contre à coup sûr des éléphants en nombres. Des troupeaux (la population y est estimée à environ 400 individus) comme des individus isolés – parfois certains s’aventurent même sur le sentier à l’assaut des véhicules pour soutirer à des touristes imbéciles de la nourriture…


Sanglier (photo par Axel)

Daims (photo par Axel)

Elephant (Photo par Axel)

Aigle huppé (Photo par Axel)
Mais le soleil une fois dépassé le zénith que sonne déjà le glas de l’escapade. Et de se diriger vers la sortie. On ressort de l’expérience avec un sentiment de trop peu. Une frustration mêlée néanmoins d’émerveillement ; se disant : une autre fois peut-être. Autrement ! 


Éléphant  (Photo par Axel)

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(1)    Martin-chasseur de Smyrne, Martin-pêcheur pie et Martin-pêcheur d’Europe.

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