Version audio de La désobéissance civile [cliquer sur l'image] |
Quelques extraits de ce livret paru en 1849. Thoreau
avait alors 32 ans.
(Tiré de l’édition Mille et une nuit – N°114)
En ouverture, cette phrase, qui pourrait placer l’auteur de Walden, ou la vie dans les bois, du côté de l’anarchisme libéral :
« J'accepte de tout cœur la devise
suivante : "Le meilleur gouvernement est celui qui gouverne le moins ». (P 1).
Pourtant Thoreau ne se définit lui-même pas comme anarchiste : « Pour parler
en homme pratique et en citoyen, au contraire de ceux qui se disent
anarchistes, je ne demande pas d'emblée « point de gouvernement »,
mais d'emblée un meilleur gouvernement ».
Pour plus amples développements sur ce thème, je renvoie à un billet bien documenté
sur cette page :
Sur le respect inconditionnel à la loi :
« La loi n'a jamais rendu les hommes plus justes d'un iota ; et, à
cause du respect qu'ils lui marquent, les êtres bien disposés eux-mêmes
deviennent les agents de l'injustice. Le respect indu de la loi à fréquemment
ce résultat naturel qu'on voit un régiment de soldats, colonel, capitaine,
caporal, simples soldats, artificiers, etc., marchant en bel ordre par monts et
par vaux vers la guerre, contre leur volonté, disons même contre leur sens
commun et leur conscience. […] Ils ne doutent pas que l'affaire qui les occupe
est une horreur ; ils sont tous d'une disposition paisible. Or que sont-ils
devenus ? Des hommes le moins du monde ? Ou des petits fortins déplaçables, des
magasins d'armes au service de quelque puissant sans scrupule ? […] Dans la
plupart des cas, il n'existe aucun libre exercice du jugement ou du sens moral
; […] l'on pourrait réaliser des hommes de bois qui rempliraient aussi bien
cette fonction. Ils ne méritent pas plus de respect que des épouvantails ou un
étron ». (P 12 - 14)
Sur ceux qui se contentent de s'opposer en opinion
(Écrit dans le contexte d'une société pour part, esclavagiste) :
« Des milliers de gens sont opposés en opinion à
l'esclavage et à la guerre, mais ils ne font rien, en effet, pour y mettre un
terme […] et s'asseyent les mains dans les poches en déclarant qu'ils ignorent
quoi faire et ne font rien ; […] Ils hésitent, et ils regrettent et parfois ils
font des pétitions; mais ils ne font rien d'ardent ou d'efficace. Ils attendent
pleins de bonne volonté, que d'autres portent remède au mal ». (P 18)
Sur la portée du vote pour la justice :
« Même voter pour la justice, ce n'est rien faire pour elle. C'est se contenter
d'exprimer un faible désir de la voir prévaloir. Le sage ne laissera pas la
justice à la merci du hasard, il ne souhaitera pas la voir l'emporter par le
pouvoir de la majorité. Il y a peu de vertu dans l'action des masses d'hommes ». (P
19)
Du refus de payer ses impôts (ce qui valut à
Thoreau une nuit en prison). Toujours à placer dans le contexte d'un État qui
admet l'esclavage, et qui, en outre fait la guerre au Mexique (1846) :
« Si un millier d'hommes refusaient de payer leurs impôts cette
année, ce ne serait pas une mesure violente et sanguinaire, comme le fait de
les payer et permettre par-là à l'État de commettre la violence et verser le
sang innocent. Telle est, en fait, la définition d'une révolution paisible […]
Si le percepteur, ou tout autre fonctionnaire, me demande, comme l'a fait l'un
d'eux : "Mais que voulez-vous que je fasse ?", ma réponse est
: "Si vous voulez vraiment faire quelque chose, démissionnez" ». (P
28)
« Le riche est toujours vendu à l'institution qui fait sa richesse ». (P 29)
Sur ce à quoi l'on s'expose en refusant de payer l'impôt :
« Si je réfute l'autorité de l'État lorsqu'il présente sa feuille
d'impôts, il ne tardera pas à prendre et à détruire tous mes biens, à me
harasser sans fin moi et mes enfants. Cela est chose pénible ». (P30 – 31)
Et le remède, pour y échapper ? La réponse se trouve
un peu plus bas sur la même page :
« Il faut prendre une location ou un refuge quelque part, cultiver
une petite récolte et se hâter de la manger. Il faut vivre en autarcie, ne
dépendre que de soi, être toujours prêt à lever le camp sans avoir beaucoup à
emporter ».
Ce texte est à rapprocher évidemment de sa mise en
pratique par Thoreau en 1845. Il décide alors, en effet, d'aller vivre seul
dans le bois de Walden, sur le bord d’un étang. Avec l'aide de quelques amis
dont Emerson il y construit une cabane. L'expérience cessera en 1847. Si les
résultats de l’expérience peuvent apparaître contrastés, maman n'ayant jamais cessée de lui 'servir la soupe' durant toute cette période, au-delà de ce cas d’école,
l’idée est là et le principe posé.
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