Approche du Garlaban... (photo par Axel)
Je n’ai qu’un vague souvenir de mes lectures de
Marcel Pagnol… D’ailleurs y réfléchissant je crois n’avoir lu de lui, alors en
classe de troisième, que « Le
château de ma mère »[1]. Peut-être ai-je eu auparavant
entre les mains le premier tome de cette trilogie de l’enfance reconstruite.
Rien ne l’atteste.
L’incipit n’a rien pour me plaire : « Après l’épopée cynégétique des bartavelles,
je fus d’emblée admis au rang des chasseurs… ». S’il est question d’oiseaux,
le reste on l’aura compris évoque ce qui jadis était un moyen de se nourrir, et
qui aujourd’hui est devenu une activité de loisir, quand elle ne se cache pas
derrière de prétendues missions de « régulation » - aimer la nature
au bout d’un fusil ! Drôle de perspective quand on y songe. Quoi qu’il en
soit, dans les forêts muées en garrigues où l’écrivain passa les heures
heureuses de son enfance, des perdrix bartavelles il n’en reste presque plus.
Sentier vers le Garlaban (photo par Axel)
Pagnol est né et a grandi à Aubagne. Enfant, il aimait
à parcourir la campagne et les massifs alentour. « Je suis né dans la ville d’Aubagne sous le Garlaban couronné de chèvres
au temps des derniers chevriers… ».
Le Garlaban, plus qu’un simple promontoire rocheux
posé au-dessus de la ville est un symbole, un veilleur antédiluvien – sa
formation remonte au Mésozoïque. A son sommet est planté une croix – c’est,
dit-on, une tradition ou une pratique courante. Pour attester du phénomène, en
les contrées d’origine catholique, on les appelle « croix sommitales ».
Vue de la croix sommitale (photo par Axel) |
Sur le toit du Garlaban (photo par Axel) |
La croix sommitale du Garlaban ( photo par Axel) |
Quant à l’étymologie de Garlaban, comme beaucoup d’autres, elle reste controversée. Cependant les suffrages plaident pour une origine provençale : « gardia » (vigie, lieu de garde) et « laban » (grotte).
Garlaban enfin, dira Pagnol dans La Gloire de mon père, « c’est une énorme tour de roches bleues,
plantée au bord du Plan de l’Aigle, cet immense plateau rocheux qui domine la
verte vallée de l’Huveaune ».
Paysage, sur le flanc du Garlaban (photo par Axel) |
On l’aura compris, le massif du Garlaban et ses contreforts sont propices aux randonnées et autres balades, que l’on soit sur les traces de l’écrivain ou sans motifs précis – juste occupé à jouir de vallons point encore trop souillés par l’expansion humaine. En particulier, hors saison et vacances scolaires, pour peu que l’on soit épris de tranquillité (ou lassé de la fréquentation de ses congénères).
Et sous le soleil de la mi-mars de se lancer sur
les pentes du mont fameux, laissant la voiture au parking « Du puit de Raimu ». De là, après
avoir salué un serin Cini haut perché, prendre en direction du col d’Aubignagne,
ne croisant que des panneaux à l’usage des chasseurs.
Vue de Marseille (Photo par Axel) |
Puis, avec Marseille dans le dos, gravir en sinuant le sentier des garrigues qui conduit au col du Garlaban. A son approche d’ailleurs, il est bon de s’écarter un peu du chemin, pour visiter les gravures abandonnées à la postérité sur des pierres plus ou moins plates ; des dessins ou des textes commis par des voyageurs soucieux de laisser une trace de leur passage (la plupart des graffitis sont inspirées par l’œuvre de Pagnol).
Gravure (photo par Axel) |
Gravure (photo par axel) |
Gravure (photo par Axel) |
Gravure (photo par Axel) |
Reste alors à gravir les quelque dernières centaines
de mètres. Un parcours plus abrupt parmi la rocaille, un peu plus hasardeux
aussi, jusqu’à la croix sommitale. Et de se retrouver là, en plein vent sur l’éperon
au-dessus du vide, à surveiller l’arrivée d’improbables hirondelles en cette
saison.
Après une poignée de photographies et le sel de méditations
venteuses, redescendre pour empreinter une sente qui mène au vallon des Piches.
Dévaler l’étroit boyau se révèle une expérience magique, en particulier pour
qui n’est habitué qu’aux plaines. S’y arrêter est une invite au farniente. Boire
le paysage, écouter le silence et croiser la fauvette Pitchou sont des délices
rares. Plus tard, plus bas, dans le ciel on se réchauffera l’âme à contempler le
vol du Circaète Jean-le-Blanc.
Le vallon des Piches (photo par Axel) |
Le vallon des Piches (photo par Axel) |
Atteindre enfin le col Salis et, de là, aller à la
Baume du Plantier (grotte de Manon) – plutôt un abri sous roche.
Col Salis (photo par Axel) |
La grotte "Manon" (photo parAxel) |
Reste à rejoindre le col d’Aubignane et, avant de songer
à rentrer, l’esprit reposé au moins autant que les jambes empesées, grimper le sentier
Pierre Tchernia pour joindre et dépasser les ruines éponymes, sur les barres de
Saint-Esprit – à la vérité un ancien décor de cinéma : « Regain » (1937).
Les ruines d'Aubignagne (Photo par Axel) Les ruines d'Aubignagne (photo par Axel) Les ruines d'Aubignagne (photo par Axel)
Au fond Pagnol n’aura été qu’un prétexte à une
escapade de cinq bonnes heures ; promenade solitaire dans un paysage
émouvant. Cet écrivain-cinéaste que je ne sais rien au fond, classé à priori dans
la même catégorie que Prévert. Du côté des littérateurs ou poètes « gentillets » ; ces patronymes
en forme de patrimoine national – sentant bon le terroir… Monuments intouchables.
Canonisés !
Mais reste le paysage …
Un autre veilleur.... (photo par Axel) |
[1]
Je possède toujours mon exemplaire, une édition de poche de 1978. Un roman que
je me suis promis de relire un jour… Un jour prochain !
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