Blogue Axel Evigiran

Blogue Axel Evigiran
La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


30 juin 2017

Uxmal, sous la pluie...


En souvenir d’un périple mexicain, un extrait de l’incontournable livre décorée des planches de Frederick Catherwood , « Les cités perdues des Mayas » : 

Uxmal, vue de la pyramide (photo par Axel)

« A New York, Stephens avait fait la connaissance d’un Hispano-Américain du nom de Simon Peón, descendant direct des Montejos, propriétaires du Yucatan depuis le XVIIe siècle, qui l’avait invité à venir le visiter s’il passait par Mérida, ajoutant qu’il possédait toute une ancienne cité, Uxmal, qui devrait lui être du plus grand intérêt. Stephens se rendit donc immédiatement à la résidence princière des Peón pour apprendre que don Simon se trouvait précisément dans son hacienda d’Uxmal, distante de 80 km environ. Catherwood, malgré sa fièvre, et lui se mirent en route sur-le-champ. Arrivés à l’hacienda, Frederick étant trop faible pour continuer, l’Américain le confia aux soins de leur généreux hôte et s’en alla visiter seul la cité fantôme. Une merveilleuse surprise l’attendait : Uxmal, loin d’être  étouffée par une exubérante forêt tropicale, se dressait, encore superbe, sur un plateau ou ne poussaient que des buissons…. »

Pyramide d'Uxmal (photo by Axel) 
Uxmal, quadrilatère des nonnes (photo by Axel)
Vue d'Uxmal, photo by Axel
Uxmal sous la pluie.... (photo par Axel)
Quadrilatère des nonnes (photo by Axel)
Uxmal, vue depuis le palais du Gouverneur (photo par Axel)
Uxmal, palais du Gouverneur (photo by Axel)
Vue d'Uxmal depuis le palais du Gouverneur (photo by Axel)
Uxmal, détail (photo par Axel)

Et, retour à l'Hacienda...

Hacienda d'Uxmal (photo par Axel)
" Stephens et Catherwood dégagèrent et mesurèrent une grande partie des monuments : ce travail permit alors d'établir un plan précis du site. Frederick se mit ensuite à dessiner un par un les bâtiments, accordant une attention toute particulière au palais du Gouverneur."

14 juin 2017

Castoriadis et la démocratie


Castoriadis
Ecoutant en podcast ce matin en voiture Les chemins de la philosophie. Une émission sur Cornélius Castoriadis, tiré du cycle de la semaine dernière « la politique, est-elle un métier ? ».
En écho de l’actualité politique…


« Une société démocratique, quel que soit sa taille, est toujours formée d’une pluralité d’individus qui participent tous au pouvoir, dans la mesure où chacun a autant qu’un autre la possibilité effective d’influer sur ce qui se passe, ce qui n’est absolument pas le cas en pratique dans nos sociétés démocratiques, qui sont plutôt ce que j’appellerai des oligarchies électives libérales, avec des strates sociales bien barricadées dans leurs positions de pouvoir. Certes ces strates ne sont pas tout à fait étanches. C’est le fameux argument  des libéraux : Monsieur Machin a commencé par être vendeur de journaux, puis grâce à ses capacités,  il a fini président de la General Motors. Ce qui prouve simplement  que els couches dominantes savent aussi se renouveler en recrutant  dans les strates inférieures les individus les plus actifs dans le jeu social tel qu’elles l’ont organisé. Et il en va de même pour la politique, dominée par la bureaucratie des partis. Peu importe qu’ils soient au gouvernement ou dans l’opposition, qu’ils soient socialistes ou conservateurs, ils sont en un sens complices  pour ce qui est des enjeux inamovibles de pouvoir. Ils ne changent pas en fonction d’une quelconque volonté  populaire, mais selon les règles du jeu bureaucratique de l’appareil partisan, qui vont promouvoir de nouveaux dirigeants. Mais il ne faudrait pas croire pour autant que les oligarchies dominantes, capitalistes ou politiciennes, violent  partout et toujours un peuple innocent, à son corps défendant. Les citoyens se laissent mener par le bout du nez, se font berner par des politiciens habiles ou corrompus, et manipuler par des médias avides de scoop. Mais n’ont-ils aucun moyen de les contrôler ? Pourquoi sont-ils devenus tellement amnésiques ? Pourquoi oublient-ils si facilement que le même R, le même M, il y a un an, il y a quatre ans, tenait de tout autres discours ? Ont-ils été zombifiés par des esprits maléfiques ? »
Castoriadis, Les enjeux intellectuels de la démocratie, une société à la dérive (1986)

« La vraie démocratie c’est, il y a une phrase merveilleuse d’Aristote, qui est citoyen ? Est citoyen quelqu’un qui est capable de gouverner et d’être gouverné. Est-ce qu’il y a 40 millions de citoyens en France en ce moment ? Mais pourquoi ils ne seraient pas capables de gouverner ? Mais parce que toute la vie politique vise précisément à leur désapprendre à gouverner. Elle vise à les convaincre qu’il y a des experts à qui il faut confier les affaires. Et donc  il y a une contre-éducation politique. Au lieu que les gens s’habituent  à exercer diverses sortes d’initiatives, de responsabilités, de pouvoir, etc.  Ils s’habituent à suivre ou à voter pour options que d’autres leur présentent. Alors évidemment, comme les gens ne sont loin d’être idiots, le résultat c’est quoi ? C’est qu’ils y croient de moins en moins. Il qu’il y a ce cynisme, l’apathie politique… »
Castoriadis, Entretien en 1998 (Là-bas si j’y suis)


En invité de l’émission Nicolas Poirier, excellent passeur. Extrait :


« Pour Castoriadis il n’y a pas de philosophie préalable à partir de laquelle on devrait tirer des orientations programmatiques qu’on appliquerait à une réalité sociale et historique qui serait vierge de tout présupposé. La politique c’est une activité, c’est une praxis, pour reprendre un peu un terme d’origine aristotélicienne sinon marxienne, qui a sa spécificité, un mode d’agir qui lui est propre. Et qui en aucun cas peut se déduire d’une ontologie ou d’une métaphysique préalable. C’est ce qu’il critique notamment chez Platon, où on veut fonder finalement la citoyenneté sur l’expertise et sur la détention d’une épistémè. (…) Il faut lire Platon comme anti-modèle en quelque sorte. Il faut se référer plutôt aux historiens, aux premiers penseurs présocratiques, mais pas du tout à la métaphysique de Platon.
Pour Castoriadis il y a une expertise, un savoir dans des domaines très précis. Un professeur, un médecin, un pilote d’avion, un artisan dans un domaine spécialisé, etc. Mais dans le domaine des affaires humaines il n’y a pas d’expertise, parce qu’Aristote dit qu’en politique on statue  toujours sur ce qui est de l’ordre de la contingence et non pas de l’ordre de ce qui est la nécessité. La politique pour Castoriadis c’est de l’ordre de l’opinion, mais une opinion qui peut être éclairée. Ce n’est pas le préjugé, la passion. Ce n’est pas l’expression des pulsions. (…) Cela ne peut pas être une expertise technique, une compétence qui serait acquise dans des instituts politiques, dans des écoles nationales d’administration, ou même en faisant une thèse de doctorat sur  la philosophie politique. (…)
Quand on parle des élections ont dit que c’est démocratique. Or Castoriadis réaffirme : (…) dans le domaine démocratique on vote pour instituer des lois et non pas pour donner mandat à des chefs. Comme le dit Rousseau : un peuple libre obéit a des lois, pas à des chefs (…)

Selon Castoriadis, la plupart des philosophes classiques modernes auraient considéré les institutions contemporaines comme des oligarchies. (…). Pour Montesquieu, par exemple, il y a trois formes de régime : la monarchie, le despotisme et la république. (…). Et dans un régime républicain (il fait distinction) : lorsque le corps social exerce directement le pouvoir on a une démocratie ; lorsqu’au contraire il délègue à une minorité de personnes sélectionnée on a un aristocratie. Pour lui notre régime serait une aristocratie élective, d’où l’idée de Castoriadis que nous vivons dans des oligarchies libérales ».

7 juin 2017

Lucrèce, dans jardin…


Après une séance de désherbage en fin d’après-midi au jardin, entre grand vent et soleil, il m’a semblé opportun  de laisser reposer mes avant-bras, excités par un trop fort bain d’orties…

Aussi, sur la chaise longue prendre le premier magazine venu… En l’occurrence le Philosophie magazine de mars dernier et le feuilleter au hasard.

Un extrait du livret central tout d’abord. Et Boèce condamné à mort en 522 pour n’avoir pu résister aux sirènes du pouvoir, et d’accepter de Théodoric, roi des Ostrogoths, le titre de consul et de Magister Officiorum
Le monarque suivra sa victime au tombeau en 526 par suite de dysenterie…

A quelques pages de là, comme en écho au sort tragique du défenseur de l'orthodoxie catholique, Tous les chemins partent de Rome, avec cet extrait, de l’excellent Alain Gigandet, spécialiste de l’épicurisme :


« De la nature, et Lucrèce est plus insistant qu’Epicure sur le désengagement politique. Selon lui, la recherche du pouvoir a pour ressort la peur de la mort ; mais au lieu d’aider l’arriviste à conjurer les dangers, cette peur l’y expose bien plus encore car ‘la foudre frappe de préférence les sommets’. Comme son maître, le poète oppose à l’engagement fiévreux le modèle de la société, pacifiée et frugale, des amis. Axé sur la modération des désirs, et recommandant en général une forme d’abstentionnisme, l’épicurisme s’érige en contre-modèle d’une civilisation de l’ambition et de la compétition triomphante ».