Blogue Axel Evigiran

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La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


27 nov. 2022

Strasbourg, son parlement et la cité-jardin Ungemach

 

Vue du parlement européen (photo par Axel)

Un parlement toujours en construction... (photo par Axel)
Vue arrière du parlement (photo par Axel)

Musardant début novembre dans les rues de Strasbourg, profitant d’un ensoleillement tout à fait anormal pour la saison, la curiosité poussa mes pas du côté du quartier du parlement européen – sans nulle autre motivation que de me faire une idée in situ de l'allure que pouvait avoir ce temple moderne où s’exerce dit-on pouvoir discrétionnaire et lobbying forcené.

Prenant par le quai du chanoine Winterer, on se prend à longer l'Ill, affluent paisible du Rhin. Et de croiser, perchée en pleine lumière au sommet d'un arbuste, une grive litorne en pleine vocalise – l'une des premières de la saison : l'oiseau, originaires de Scandinavie et du nord de la Russie, venant hiverner chez nous et au-delà de la méditéranée.

La promenade est tranquille, et juste avant de buter sur la monstrueuse tour de verre et d’acier du parlement, on arrive sur une petite place au nom fleuri qui s’ouvre sur un ensemble de pavillons roses, étalé en arc-de-cercle … Le contraste entre l’architecture un peu désuète et guimauve des maisons et l’emprise arrogante du bâtiment aux multiples bannières, baptisé Louise Weiss (parlementaire européenne féministe morte en 1983), est saisissant. Ce dernier, Babel contemporain, écrase littéralement les pavillons les plus proches, la forteresse moderne jetant son ombre immense sur les jardins les plus proches.

 




Mais d’où sortent ces habitations roses ? Un rapide coup d’œil sur la toile nous apprends que ce collectif de 140 pavillons se trouve être la cité-jardin Ungemach, du nom de son inventeur, et dont la construction remonte aux années 1920.

Passons sur les aspirations sociales et les arrières pensées de Charles Ungemach qui avait à faire oublier quelques accointances douteuses lors de la Grande Guerre, pour noter que le projet de cette cité s’est « inscrit dans le cadre du débat français sur l’eugénisme ». Et de découvrir que le règlement initial d’attribution de ces logements « sociaux » allait « à des couples choisis : vouloir des enfants, être en bonne santé et les élever dans de bonnes conditions d’hygiène et de moralité. Les familles devaient respecter un règlement comptant quelque 356 articles et faisaient l'objet de contrôle réguliers par un inspecteur. Le fait de ne pas faire suffisamment d'enfants (le nombre était fixé à trois) impliquait à l'époque de devoir quitter la cité, ainsi que le fait d'avoir été recalé lors du contrôle surprise annuel du domicile. »[1] Un beau programme !

Quant à la symbolique de la juxtaposions de ces architectures et de ces histoires, chacun en tirera les conclusions qu’il voudra.


Cours européenne des droit de l'Homme (photo par Axel)

 



[1]Source wikipédia et plusieurs articles sur la toile dont celui-ci : https://www.lalsace.fr/bas-rhin/2014/08/13/comment-leon-ungemach-s-est-rachete-une-conduite