Blogue Axel Evigiran

Blogue Axel Evigiran
La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


1 avr. 2021

Ornithologue par temps de guerre

 

Grive musicienne
Grive musicienne (photo par Axel)



Géographie de l’instant
, dans sa version Pocket, réunit les blocs-notes de Sylvain Tesson publiés entre 2006 et 2014. 

Idéal en livre de chevet, où à portée de transat, par temps de confinement.

Le plaisir de butiner phrases et impressions de l’instant ; en bonne compagnie… 

Le marcheur des chemins noirs est l'un des rares écrivains à tant citer les oiseaux, à être habité de leur présence ; un mot ici en passant, l'air de rien, des anecdotes, ou encore la description d'un marais et de ses habitants ; de l'aigrette au courlis ...

Affinités de tempérament ...



Je ne résiste pas à citer ce passage :

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« Jacques Delamain, mort en 1953, était ornithologue. Jacques Lacarrière le surnommait « l’Homère des oiseaux ». Cet homme consacra sa vie à écouter le peuple du ciel, à percer le mystère de leur langage. Rien ne pouvait le distraire de sa passion. Rien. Pas même la guerre de 1914. La dernière partie de son livre Pourquoi les oiseaux chantent (publié en 1930) est constitué du Journal de guerre d’un ornithologue. Nous sommes avec les poilus, dans la tranchée. Pendant que le canon gronde et que les obus fusent, Delamain écoute la grive et le pinson. L’artillerie tonne. Lui tend l’oreille pour saisir la trille des friquets. Les seuls combats qu’il décrit sont les joutes des freux et des crécerelles. L’année de Verdun, l’homme parle de « journées magnifiques, observe les ramiers et note que « la draine chante régulièrement pendant quelques minutes au lever du soleil ». Rien ne le distrayait de sa passion. Socrate à l’instant de mourir rêvait d’apprendre à jouer de la lyre. Il y a des êtres comme cela, insolents, désinvoltes, étrangers aux circonstances. La grotesque agitation de leurs semblables les ennuie au suprême. Ils savent que le chant d’un oiseau ou le vers d’un poète plus importants que les affaires des hommes ».

(P221) – Septembre 2011


Pinson des arbres (photo par Axel)


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