Vue des façades Sud et Est (photo par Axel) |
S’il est des lieux qui suintent le romantisme, au sens d’une poétique des ruines, l’archétype en est assurément le château de la Mothe-Chandeniers.
A déambuler dans la région de Chinon, entre la forteresse royale et les
chais à flanc de falaise ou il est bon de se rafraîchir tout dégustant un cru
millésimé, le détour est imperceptible, surtout si on arrive par Loudun et ses diables, méditant sur le destin torturé de Sœur Jeanne, dite des Anges …
Arrivé aux Trois-Mouthiers, entre les cours paisibles de la Barousse et
de la Boire, la vue du château depuis le parking n’est guère engageante. Ne
dépassent en effet au-dessus des arbres que les toitures d’une poignée de tours
emballées dans un dense treillis d’échafaudages. De quoi refroidir les élans
lyriques, et d’être tenté de passer son chemin. Mais, contrairement au dicton,
les premières impressions ne sont pas forcément les bonnes … Et passé le
guichet, une fois engagé dans le parc, abordant les ruines par leur versant sud
c’est le ravissement !
Ramier perché (photo par Axel) |
Vue de la façade Sud (Photo par Axel) |
Balcon de la façade Sud (photo par Axel) |
Façade Sud (Photo par Axel) |
Abandonné pendant près d’un siècle et retourné à la nature le château
fut racheté en 2017 par une société à fonds participatifs, devenant à la foulée la plus grande copropriété du monde. Ainsi est-il possible, à peu de frais, de devenir
Co-châtelain de la Mothe-Chandeniers et de contribuer à la préservation et la restauration
du château, en conservant bien sûr la féérie des lieux … La nature entremêlée à
la pierre et ses reflets d’eau ; inextricablement embrassés.
« Le château forteresse est mentionné dès la fin du XIe siècle sous
le nom de la Mothe-de-Bauçay. Hugues III de Bauçay en est probablement le
seigneur et bâtisseur. Cette puissante famille possédera cette terre jusqu’au
début du XVe siècle. A cette époque, Marie de Bauçay apporte le château en dot
à Guillaume de Chaunay, seigneur de Champdeniers (Deux Sèvres). La famille de
Rochechouart prend possession des lieux en 1448 lorsqu’Anne de Chaunay se marie
à Jean de Rochechouart, formant ainsi la branche des Rochechouart-Chandenier.
Le château porte alors le nom de la Mothe-Chandenier ou Mothe-de-Bauçay.[1]
»
Je passe ici les détails, mais le château passera ensuite, au fil des
siècles entre différentes mains et sera reconstruit dans les années 1870 dans un
style néogothique. Le feu le ravagera en 1932 et il tombera peu à peu à l’état
de ruine ; des ruines ou la nature reprendra ses droits, conférant au fil
des ans un aspect fantastique à l’édifice …
Angle de la façade Est (photo par Axel) Miroir d'eau (photo par Axel) Balcon vénitien de la façade Est (photo par Axel)
Des arbres sinuent aux fenêtres, des grappes de lierre plongent des balcons.
La blancheur de l’architecture tranche idéalement avec le glauque limpide des
douves. Sensation renforcée par la verdure s’élançant des murs. Ici ou là des
branchages cherchent le ciel et la lumière. Les oiseaux viennent s’y reposer. Des
ramiers et des tourterelles, des rougegorges flamboyants et des mésanges
afférées … Les recoins et les niches sont aussi le domaine des troglodytes aux
chants explosifs … S’ébrouent parmi les buissons les grives et les merles
furtifs qui viendront au crépuscule se percher haut pour nous enchanter de leur
répertoire. Et la nuit venue on imagine bien venir se poser dans l’échancrure
d’un mur, une chevêche d’Athéna – vigie du domaine. Sans oublier au printemps la
mélodie du rossignol, si chère à Châteaubriand.
La visite des lieux s’inscrit dans une circonvolution trigonométrique,
cercle à rebours qui se termine par la cour intérieure. Bref, pour l’essentiel
une promenade nonchalante et rêveuse autour du château.
Chaque façade a son charme et ses mystères.
La façade sud est la première que l’on découvre. L’effet est saisissant et
on ne lasse pas d’admirer on ne sait d’ailleurs trop quoi - à boire l’ambiance
si particulière qui se dégage de ce fragile équilibre entre nature et
architecture. Impressionnés sans doute par l’harmonie des lieux ; cette délicatesse
silencieuse et un peu flottante …
On emprunte alors un pont suspendu en bois qui amène nos regards sur la
façade est, là où se trouvent la terrasse et le balcon vénitien. Le lichen y
prospère et poussent des petits cornouillers. Au fils de l’eau, entre deux tours
opportunément dissymétriques, les arches et colonnades se mirent dans le miroir
à la fois mouvant et immobile de l’onde.
Façade Nord (photo par Axel) |
Pont qui conduit à la cour intérieure (photo par Axel) |
Mécanisme de l'écluse (photo par Axel) |
De la façade Nord on retiendra surtout le romantisme du mécanisme rouillé actionnant les écluses de la douve du château. Altérité du métal et de ses engrenages …
Dans la cour intérieure enfin, redevenue sauvage, se côtoient le blason
des famille Ardouin et D’Ornezan et les mousses, les fougères et la verdure de
l’ombre venue recouvrir d’anciens escaliers.
Cour intérieure (photo par Axel) |
Cour intérieure (photo par Axel) |
Cour intérieure (photo par Axel) |
Cour intérieure (photo par Axel) |
Cour intérieure (photo par Axel) |
Cour intérieure (photo par Axel) |
[1]
Thérèse de Laplane – Source : https://www.lanouvellerepublique.fr/vienne/commune/les-trois-moutiers/les-trilogies-de-la-mothe-chandeniers