Blogue Axel Evigiran

Blogue Axel Evigiran
La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


21 déc. 2020

La fin d’un monde : le calendrier maya et le calcul de votre date de naissance

Musée d'anthropologie de Mexico (Photo par Axel)

En cette période de la fin d’un monde, et tandis quelques hurluberlus investissent les pentes du Pech de Bugarach, plutôt que de sombrer dans l’hystérie apocalyptique, ou, tout à rebours,  le dédain blasé, il m’est apparu plus ludique d’évoquer ce fameux calendrier maya au travers d’un petit amusement consistant à calculer et traduire sa date de naissance - ou tout autre événement du choix de chacun - en maya .

Un peu d’histoire est ici nécessaire.

Mais évoquons tout d’abord la notion de temps.

Si, selon les traditions, les civilisations optèrent soit pour une conception du temps linéaire, soit plutôt pour une conception cyclique, puisque de temps il s’agit, encore faut-il s’entendre sur ce que recouvre ce mot fort connoté. Etienne Klein, dans son excellent ouvrage Les tactiques de Chronos, pose les bases de la réflexion : « Le temps est seulement ce qui permet qu'il y ait des durées. Il est cette machine à produire en permanence de nouveaux instants. Il fabrique la succession d'instants et nous ne percevons en réalité que ses effets ».


Palenque (Photo par Axel)

Ainsi, chez les grecs anciens, avec Héraclite, tout coule. Mais alors, s’interroge le physicien « si le temps était un fleuve, quel serait son « lit » ? Par rapport à quoi s'écoulerait-il ? Que seraient ses « berges ? ». Du côté Parménide, a contrario, le mouvement est pensé comme une succession de positions fixes. Auquel cas, conclut E. Klein, « tout devait pouvoir être décrit à partir d'un seul concept d'immobilité. Le devenir n'était donc qu'une illusion relevant du « non être ».

Si dans les civilisations premières, basées sur l’observation de la nature les conceptions cycliques du temps dominent, avec les physiciens nous entrons dans un temps linéaire, irréversible, et respectant le principe de causalité.

Reste le temps psychologique, le temps tel que perçu, mais c’est un autre débat.

Le calendrier dans lequel nous baignons, et qui nous apparaît si familier, en est réalité complexe. C’est qu’il conjugue tout à la fois des notions de cycles et de linéarité. Cyclique il l’est à travers la répétition des semaines, des mois et des saisons. Mais il est aussi inscrit dans la durée, avec une flèche du temps irréversible. Enfin, nous comptons le temps à partir d’un instant zéro choisit arbitrairement.

Ce système de calendrier, en son principe, est comparable à celui des mayas. Dans les grandes lignes les différences sont de deux ordres : d’une part les mayas comptaient de 20 en 20 (au lieu de 10 en 10 pour nous). D’autre part ils avaient deux calendriers imbriqués. Un calendrier profane, dit « vague » et un calendrier cérémoniel.

Aujourd’hui, les études archéologiques et historiques permettent d’affirmer, d’une part, que « l’intérêt des Mayas pour les dates qu’ils inscrivaient sur leurs stèles ne traduisait pas un culte du temps, mais exprimait le souci d’inscrire dans la durée le règne de leurs souverains. » (1); d’autre part qu’ils n’étaient pas astronomes mais astrologues et que « la complexité qui résulte de la combinatoire de multiples cycles est fonctionnelle ; elle permet au devin de choisir entre une multitude d’alternatives, les unes favorables, les autres non, et de contrarier les destins trop adverses ».



Entrons dans le vif du sujet

Les mayas avaient donc deux calendriers dont l’origine est à rechercher chez les Olmèques (base commune de tous les calendriers méso-américains)

Le Tzolkin

Le premier de ces deux calendriers est un calendrier divinatoire et cérémonie, appelé tzolkin. Sa durée est de 260 jours.

S’y combinent 20 noms de jours (imix, ik, etc…) aux chiffres allant de 1 à 13.

Dans ce système, le même jour, ne réapparaît qu’au terme de 13 x20 jours.


La Haab

Le second calendrier, nommé haab, est un cycle solaire dit « vague » qui comprend 360 jours (18 mois de 20 jours) + 5 jours, souvent considérés comme néfastes.


Inscription des jours dans les deux calendriers

Un jour est défini à la fois par sa position dans le tzolkin et dans le haab.

Les cycles de tzolkin et du haab se combinent sur le modèle d’une roue dentée imbriquées et il faut attendre 52 années vagues ou 73 cycles cérémoniels pour que la désignation d’un jour dans les deux cycles se répètent : c’est la roue du calendrier. 

(Pour déduire ces deux nombres – 52  et 73 – il faut trouver le plus petit commun multiple, ici 5. 365 / 5 = 73 et 260/5 = 52)



Le compte long

Afin de pouvoir inscrire leur histoire dans la durée les mayas ont inventé le compte long (ils comptent de 20 en 20 et non de 10 en 10). Ainsi le décompte des jours se défini en cinq unités de comptes distinctes, multiples de 20


1 Baktun = 144 000 jours

1 Katun =  7200 jours (soit près de 400 de nos années)

1 Tun =  360 jours

1 Uinal  = 20 jours

1 Kin = 1 jour


Nota : des unités de temps encore supérieures au Baktun ont été découvertes. Ainsi  le pictun qui fait 20 baktuns, soit près de 7885 de nos années. On a même identifié l’alautun, soit 8000 pictuns (unité qui frise l’inconcevable)


Point de départ du grand cycle 

Cette date fameuse, dans le compte long, s’écrit : 13.0.0.0.0 4 ahau 18 cumku.

(4 ahau est le jour de ce point de départ dans le calendrier rituel et 8 cumku, le même jour représenté dans le calendrier « vague »)

La correspondance dans notre calendrier est le 11 août 3114 av. J.-C (date maya : 4 ahau 8 cumuk)

Il est probable que cette date corresponde symboliquement à une nouvelle création du monde ( 13 baktuns = 1872 000 jours, soit 5124,37 années)

Ce point de départ du grand cycle (qui est encore le nôtre jusqu’au 21 ou 233 décembre 2012, selon les comptes), établi au jour mythique du 4 ahau 8 cumku de l’an 3114 av JC correspond à une antiquité très supérieure à toute présence maya et pour l’heure n’est relié à aucun événement.


Exemple du calcul d’une date dans le compte long

9.17.0.0.0 13 ahau 18 cmuku  signifie que depuis le point 0 se sont écoulés 9 baktuns (9 x 144 000 jours) 17 katuns (17x 7200 jours) 0 (le reste) pour atteindre le jour donné, soit le 13 ahau 18 cumku.


Temps linéaire et  temps cyclique

Ainsi se conjugue, dans l’imbrication des deux calendriers maya, le Tzolkin et le Haab, avec cette date mythique de départ du Grand Cycle, à la fois un temps linéaire et un temps cyclique.

Ce grand cycle long de 1872 000 jours ou 5124,3661 années apparaît comme ainsi une sorte de compromis entre temps linéaire (parce assez long) et temps cyclique (parce que durée finie).


Calculer sa date de naissance en maya

Date choisie : 12 mars 1993

Tout d’abord il faut convertir la date choisie en son équivalent en nombre de jours du calendrier julien, en usage jusqu’à l’adoption de notre calendrier actuel.

Facteur corrélation : 01 janvier 2000  = 2 451 545 jours

A ce chiffre, pour atteindre le 12 mars 1993, il faut retrancher le nombre de jours écoulés avant le référentiel du 01 janvier 2000, donc  :

Oter 7 x365 pour arriver au 01 01 1993 puis ajouter 1 jour (année bissextile 1996) et enfin ajouter 71 (le 12 mars est le 71ième jour de l’année).

Le résultat est : 2 451 545 + 1 + 73 – (7x265) =   2 449 064

[Pour ceux qui préfèrent directement aller au résultat, il existe sur la toile des calculateurs automatiques, où il suffit de saisir la date que l’on souhaite obtenir en calendrier julien – d’un calculateur l’autre il peut y avoir quelques jours d’écart]

Maintenant convertissons notre résultat en maya :

On enlève à ce chiffre une constante de corrélation de 584 283 jours et ce total est divisé par chaque unité de temps maya

2 449 064 – 584 283 =  1 864 761 


Baktun : 144 000 jours

Katun : 7200 jours

Tun : 360 jours

Uinal : 20 jours

Kin : 1


Ici donc 1 864 761 / 144 000 = 12,97

(reste 1 864 761 – 12 x 144 000 = 136 761)

On obtient : 12 baktum


136 761 / 7200 = 19

(reste 136 761 – 18 x 7200 = 7161)

On obtient : 18 katun


7161 / 360 = 19,89

(reste 7161 – 19x360 = 321)

On obtient 19 tun


321 / 20 = 16,05

(reste 321 – 16x20 = 1)

On obtient 16 uinal et 1 kin


D’ou la date 12.18.19.16.1


Chichen Itza (photopar Axel)

Les calculs des jours rituels de l’année solaire s’obtiennent par des divisions par 13 20 et 365



Bon le résultat peut ici également directement s’obtenir via un calculateur, mais il est toujours bon de comprendre le mécanisme, la méthodologie, qui y amène les écarts proviennent des arrondis). 

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(1) Pour ce billet je me suis largement adossé sur deux excellent ouvrages consacrés aux mayas. D’une part, Les Mayas, avec des textes d’Eric Taladoire paru aux éditions Chêne. D’autre part un guide des Belles Lettres intitulé également, avec originalité, Les mayas, et écrit par Claude-François Baudez.

1 déc. 2020

Montaigne, par temps de Covid

 

Lecture .... (photo par Axel)

Me voici quelques années déjà avec les Essais du sieur de Montaigne résolument à portée de main ; allant mon rythme dans cette lecture délicieuse, porté par le sentiment d’avoir trouvé là un bon compagnon qui me cause par-dessus l’épaule. De l’abandonner parfois des semaines. Mais toujours y revenir.

Suivant sa leçon, je vis du jour à la journée, ne cherchant « aux livres qu’à m’y donner du plaisir par un honnête amusement »[1]. Une conversation dilettante, en bonne compagnie.

Et là, profitant du crépuscule, de finir le dernier chapitre du livre II où il y malmène l’engeance des médecins de son temps. Qu’on se rassure, ainsi qu’il le confesse à Madame de Duras, à la fin du chapitre « … je n’eusse pas osé remuer si hardiment les mystères de la médecine, attendu le crédit que vous et tant d’autres lui donnez, si je n’y eusse été acheminé par ses auteurs mêmes. Je crois qu’ils n’en ont que deux anciens Latins, Pline et Celsus. Si vous les voyez quelque jour, vous trouverez qu’ils parlent bien plus durement à leur art, que je ne fais : je ne fais que la pincer, ils l’égorgent »[2].

L’effet produit par cette lecture est singulier, tant il sonne juste par ces temps de Covid et de la guerre des experts proclamés. Car Montaigne est inactuel. C’est-à-dire actuel par son atemporalité - touchant à quelques chose de l’universelle condition des hommes. Et s’il affirme : « La santé je l’ai libre et entière, sans règle, et sans autre discipline, que ma coutume et de mon plaisir », c’est que, selon lui, « les médecins ne se contentent point d’avoir la maladie en gouvernement, ils rendent la santé malade, pour garder qu’on ne puisse en aucune saison échapper leur autorité. D’une santé constante et entière, n’en tirent-ils pas l’argument d’une grande maladie à venir ? » Comment lui donner tort ? La vie, on le sait, est mortelle !


Vue depuis la tour de Montaigne (photo par Axel)

Et Montaigne, du dedans de sa tour, de décrire par le menu, au fil des pages, toutes les contradictions, proférés avec moult assurance par maîtres de cette science pour un même mal - en particulier de la Gravelle, qui l’accompagna des années ; un plaisant catalogue des ordonnances et prescriptions aux antipodes les unes des autres – ce qui n’est pas sans faire songer aux débats récents sur le port du masque ou la Chloroquine par exemple.

Si aujourd’hui ces discours quant aux bons remèdes et manières de se tenir lors d’une épidémie, nous émeuvent tant, au lieu de nous trouver tranquilles, suscitant d’affreux débats et autres vains pugilats, c’est que, nous dit Montaigne « c’est la crainte de la mort et de la douleur, l’impatience du mal, une furieuse et indiscrète soif de la guérison, qui nous aveugle ainsi : c’est pure lâcheté qui nous rend cette croyance si molle et maniable ». Pire, désormais ce n’est plus même la maladie tombée sur nos bronches qui nous retourne, mais juste la peur de la voir surgir au coin de la rue. Ceci expliquant sans doute qu’il nous arrive de croiser, le soir dans une rue déserte ou dans les bois, au milieu de nulle part, tel promeneur harnaché de son masque et qui, sur votre passage, s’empêtre dans un détour considérable…

« Ce fut me semble Périclès, lequel était enquis, comme il se portait : vous le pouvez (dit-il) juger par là : montrant des amulettes, qu’il avait attaché au cou et au bras. Il voulait inférer, qu’il était bien malade, puisqu’il en était venu jusques là, d’avoir recours à choses si vaines, et de s’être laissé équiper en cette façon ».

Montaigne à sa manière nous donne leçon de juste mesure. Ni crédulité ni désinvolture. Mais une invite à exercer son esprit critique. Et pour finir d’une boutade : « Un médecin vantait à Nicoclès, son art être de grande autorité : vraiment c’est sûr, dit Nicoclès, qui peut tuer impunément tant de gens ».

Vue de la tour de Montaigne (photo par Axel)


[1] Essais, Livre II, Chapitre X (Des livres)

[2] Essais, Livre II, Chapitre XXXVII (De la ressemblance des enfants aux pères)



26 nov. 2020

A Montclar-sur-Gervanne

 

Vue de Montclar-sur-Gervanne (photo par Axel)

Il est des lieux nimbés d’une quiétude réconfortante. Des endroits qui, à l’instant où nous déambulations y conduisent, secouent leur poussière et tapissent l’air d’effluves d’une familiarité amicale … Ô combien singulière !  

Cela peut être le plis ombragé d’une colline, un vallon perdu dans la lande côtière, un bois minuscule et mousseux, ou parfois encore une vaste étendue de sable ou une roselière, abri des Panures et de la Gorgebleue à miroir.

Et pourquoi non, l’un de ces villages habités de silence ou s’ébrouent, la nuit venue, la pipistrelle et le Petit Duc de Scop ? Un de ces villages encore habillés de nonchalance, merveilleusement situés à l’écart des circuits prisés des gens pressés – du côté des « Chemins noirs », tels ceux mis en musique par Sylvain Tesson.

 

Eglise de Montclar (Photo par Axel)

Ainsi Montclar-sur-Gervanne, hameau d’une centaine d’âme, lové dans les contreforts du Vercors … Venant de la route Crest, le village s’esquisse de loin sur l’horizon, avant de se dessiner avec netteté, posé sur les flancs de sa colline ; une butte en forme de sein, dont le téton est formé par son église, d’où pointe le clocher – un clocher qui en a vu passer des saisons et fait sa moisson de générations. Car l’édifice religieux plonge ses fondations au cœur du Moyen-Age, dans le dernier quart du XXIIe siècle plus précisément.

Aujourd’hui l’Eglise romane Saint Marcel, du nom du onzième évêque de Die (430-510), se fissure mais tient son cap ; vigie tranquille, veillant sur paix des ossements semés autour de ses murs couleur de craie.

 

Contre le mur de l'église (photo par Axel)

Pour peu que l’on dépose ses bagages à Montclar, dans la soupente d’une vieille bâtisse en pierre aux murs tapissés de verdure fleuries, résolu à y passer une poignée de journées, sans intentions particulières, on sent monter peu à peu une sorte de sérénité, un apaisement qui a sans doute à voir avec l’absence de fracas. Car ce qui interpelle ici en premier lieu le citadin, c’est la rareté notoire des bruits liés aux activités humaines. Et c’est si bon !


vieille bâtisse en pierre aux murs tapissés de verdure fleuries (Photo par Axel)
 

Mais à respirer le charme discret de l’histoire des venelles de Montclar, on éprouve aussi l’impression d’une sorte de retour à l’essentiel, d’un sentiment d’ancrage dont on peine à définir le contour. Et qui suinte possiblement du paysage … A sourdre sous les terrasses caillouteuses et les étendues plantées de tournesol ou de vignes ; peut-être des bosquets et des bois aussi … A sinuer le long de la Gervanne, cet affluent de la Drôme.

 

Vers la porte Bayard, depuis notre perchoir (photo par Axel)

Venelle de Montclar (photo par Axel)

C’est ainsi plaisir de déambuler à toute heure à l’abri des vieilles murailles de l’enceinte de Montclar, érigées au XIVe siècle. De passer sous la porte Bayard et serpenter jusqu’aux hauteurs ; au-delà du cimetière, vers l’extrême bosse du village, située un peu au-dessus de l’église, à presque 500 mètres d’altitude. Y jouir de la vue ; un panorama à 360 degrés, magnifique ! Le matin, accompagné du chant des oiseaux ; au cœur de l’après-midi accablé de chaleur, tandis qu’en contrebas chassent les faucons. Ou encore à la nuit tombée, tandis que les ombres s’étirent en douces nostalgie … Car saisir ces instants de bonheur, c’est déjà un peu les perdre.

 

Vue depuis la butte de Montclar (photo par Axel)

Vue panoramique (Photo par Axel)

Montclar, « le mont clair », fait partie des lieux de tous les possibles, ces lieux où l’on aimerait revenir, et où l’on revient secouer les rides du temps qui passe. A écouter couler la rivière, les yeux versés dans les étoiles …

Echoué. Naufrage heureux d’un soir d’août !

En cette contrée encore assez sauvage pour que les loups y survivent encore, se promener à l’instinct. Ou ne rien faire. Boire un verre de vin et rêvasser …

Promenade dans les sentiers autour de Montclar (photo par Axel)

Et de là, peut-être, aller secouer nos pieds du côté du sépulcral Canyon des Gueulards ; à moins de préférer les hauteurs d’Eygluy-Escoulin, à voguer sur les crêtes, au-delà des restes d’un vieux château fort. Mais c’est là une autre histoire …


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LIENS A VISITER


La Drôme toursime ( Montclar-sur-Gervanne)

Eglise de Montclar-sur-Gervanne

Crest et son donjon

11 nov. 2020

Teintures d'un matin de novembre

 



Larmes posées sur un matin brumeux de novembre
Ce vert et ce rouge qui contraste avec le ciel
Salue la nature exténuée...

Et les hommes demeurent confinés
Moitié rebelles, moitié dociles
Englués dans la toile de leurs désirs
A tousser d'inquiétude sur ce monde qu'ils déciment à pleines bouchées sanglantes

Pourtant, la beauté d'une feuille
Suffit parfois, le temps d'un clic d'horloge
A essorer la pire démesure !









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Toute les photographies, furent prises ce matin en un minuscule jardin de la banlieue de Lille; sous l'œil goguenard des étourneaux... 

12 oct. 2020

Kant et l'ornithologie


Lisant le drôle et savoureux livre de Thomas de Quincey « Les derniers jours d’Emmanuel Kant » (mais à sa manière également poignant), j’apprends que le philosophe de Königsberg affectionnait la compagnie des oiseaux.

Voilà de quoi me le rendre un peu plus sympathique !..

Chardonneret
Chardonneret (Photo par Axel)

« De tous les changements que le printemps apporte, il n'y en avait plus qu'un maintenant qui intéressait Kant. Il languissait après avec une avidité et une intensité d'attente qu'il était presque douloureux de contempler : c'était le retour d'un petit oiseau (moineau peut-être ou rouge-gorge ?) qui chantait dans son jardin et devant sa fenêtre. Cet oiseau, soit le même, soit son successeur dans la suite des générations, avait chanté pendant des années dans la même situation. Et Kant devenait inquiet quand le temps froid avait duré plus longtemps qu'à l'ordinaire et retardait son retour. Comme Lord Bacon en effet, il avait un amour enfantin pour tous les oiseaux ; en particulier, il s'appliquait à encourager des moineaux à faire leur nid au-dessus des fenêtres de son cabinet de travail. Quand ceci survenait, et c'était fréquent à cause du profond silence qui régnait dans cette pièce, il guettait leur travail avec le délice et la tendresse que d'autres donnent à un intérêt humain ».

Les derniers jours d'Emmanuel Kant
Tiré du film les derniers jours d'Emmanuel Kant
 

La mémoire me fait défaut et je ne sais plus dans quel roman j’ai pu lire que quelqu’un qui aime les oiseaux ne peut pas être tout à fait mauvais… Jolies paroles auxquelles je ne suis pas loin de souscrire.

Mais pour en revenir au père de l’impératif catégorique, mieux que de se satisfaire de la douce promiscuité avec la gent avienne, il était aussi capable de reconnaître le chant des oiseaux. Pour preuve : 

« Kant prit une tasse de café et essaya de fumer un peu. Puis il s'assit au soleil et écouta charmé le babil des oiseaux qui s'étaient assemblés en grand nombre. Il distingua chaque oiseau à son chant, le désigna par son nom. Après avoir passé là environ une demi-heure, nous nous mîmes en route pour revenir, Kant encore joyeux mais évidemment rassasié par le plaisir de la journée ».




21 sept. 2020

Eloge d’un blogue … En août, les chemins de traverses

Les Ocres de La Bruyère (Photo par AV)

Le mois d’août, saison du Farniente, de l’indolence et de l’otium – le partage aussi des choses simples de l’existence… Le plaisir de la découverte de sentiers inconnus, de paysages variés, des garrigues aux calanques, passant par les sentes forestières des contreforts du Vercors, ou encore les ocres du Lubéron – non pas celles noyées par la foule, mais ces restes de carrières, loin des balises, dans la Bruyère ; aux bouches d’ombre sous les falaises, charriant une brise froide venu des entrailles de la terre. Sans oublier ces ruines écrasées de soleil ; ainsi Glanum, cité romaine chargée de mémoire, ou le château perdu d’Eygluy-Escoulin en Drôme « romane » et ses restes médiévaux dressés sur un éperon rocheux, perdu dans l’immensité de l’histoire. 

Sur la route, dans les Baronnies provençales, serpentant dans un défilé étroit, surprendre le vol des vautours percnoptères… 

Vautour Percnoptère (photo par Axel)

Il y a les cités aussi… Aubagne lieu de villégiature ; Marseille et son vallon des Affres, sorte de village urbain ouvert sur la méditerranée, ou encore le vieux quartier du Panier, aux murs recouverts de street-Art… Et après les hauteurs d’Apt, revenir à Montclar-sur-Gervanne, village minuscule avec son église haut-perchée au sommet d’une colline. 

Vue de Montclar-sur-Gervannes (Photo par Axel)


Ces pérégrinations, il fut si bon de les faire en la meilleure compagnie qui puisse être. Avec la femme aimée, mais aussi avec ces enfants désormais adulte de longue date – le temps file si vite. Un fils, arrivé presque au bout de sa vie estudiantine et une fille à présent mémorialiste de l’éphémère, et qui la manière de Montaigne ne peint pas l’être mais le passage, avec ce blogue dont je voudrait ici faire l’éloge… Invite à s’y rendre, à y flâner tout son soûl. 

Elle y officie sous le nom du « citoyen du monde », en hommage à Louis-Charles Fougeret de Monbron, entre autres auteur du suave « Margot la Ravaudeuse ». 


Dans les pages de ce blogue on trouvera un billet sur la cité antique de Glanum, le Vallon des Auffes, ou encore sur quelques villages du Lubéron, là où cet été nous conduisirent nos pieds poudreux.







14 sept. 2020

De la stupidité cynégétique

Reprise d’un ancien billet sur Overblog (novembre 2011), toujours de saison…

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Voilà le spectacle automnal auquel je suis allergique.

Plantés là comme des courges, près des habitations, à attendre que leurs coreligionnaires rabattent lièvres, perdrix et autres faisans à portée de plomb…

Chasse en septembre (photo par Axel)
 

J’en ai connu jadis qui équipaient le collier de leurs chiens avec des clochettes pour ne pas leur tirer dessus. ;

J’en ai vu d’autres, à marée basse en hiver sur le sable sec de la Baie de Somme, s’avancer au large dans leur voiture, prêts à mitrailler les canards et les courlis depuis la vitre ouverte de leur véhicule ;

Il y a ceux encore qui s’en vont servir de rabatteurs côté de la réserve ornithologique tandis que leurs comparses attendent alignés sur la limite autorisée ;

Ou celui-là, qui traverse en courant la route à la poursuite d’un lièvre, fusil pointé en avant alors que surgit juste devant lui un cycliste ;

J’ai assisté aussi adolescent, depuis le bord de la route, à quelques-unes de ces battues où l’on relâche des faisans d’élevage à peine capables de voler et qu’il faut pousser au cul en claquant des mains pour pouvoir les tirer comme des assiettes ;

Que dire de ceux que j’ai croisés un jour dans des dunes, bien mûrs comme l’on dit, occupés hilares à cribler de plomb les canettes de bière qu’ils avaient englouties ;

Et celui qui se vantait d’avoir tué une oie de 9 kilos et qui, tout sourire derrière ses doubles-foyers, brandissait fièrement un cygne ;


Et cet autre petit soldat qui se tenait en embuscade tout contre notre haie pour se faire un carton ;

J’en aurai presque oublié ce patron de PME qui me disait un jour, entre deux invective envers ces « salauds de pauvres », que dans la chasse au chevreuil ou au sanglier, tout ce qui l’intéressait c’était « le coup de fusil » ;

Il me souvient également d’avoir compté, un jour d’ouverture de la chasse en bord de mer il y a quelques années, le nombre effrayant de détonations assourdissant le ciel à la minute - plus de quarante ;

Je revois aussi toutes ces landes couvertes des douilles multicolores qu’enfant, encouragé par mon père, il m’arrivait de collectionner comme les marrons (1) ;

Je finirai ce sinistre catalogue (mais hélas loin d’être exhaustif) par une pensée pour ces oiseaux mutilés par les décharges aveugles qu’il m’est arrivé de trouver parfois au détour d’un sentier, estropiés ou agonisants ;

On me rétorquera peut-être qu’il s’agit là de mauvais chasseurs, de brebis galeuses, et qu’évidemment les « vrais chasseurs », eux, sont respectueux de la nature et des animaux. Voire même, poussant l’oxymore à son comble, que les légions bottées équipées de fusils et de tenues paramilitaires sont dans les faits les seuls véritables protecteurs de la nature (2) … Bien sûr ! Comment n’y avions-nous pas songé ? 

Et que l’on cesse d’en appeler à la tradition ou la ruralité pour justifier l’injustifiable : « Les chasseurs vantent volontiers leur ancrage populaire et rural, mais cette image est en partie contredite par les chiffres. S’il est vrai que les agriculteurs sont surreprésentés (ils sont 8,5 % parmi les chasseurs, pour seulement 2 % de la population active), les premiers détenteurs des permis de chasse sont des professions libérales et cadres (36 % des permis, pour seulement 17 % de la population active) » (3). La persistance de cette pratique n’est que le fruit d’un lobby puissant (4)

A dire vrai et pour conclure j’avoue ne pas comprendre pas cette pratique, qu’on l’appelle sport, loisir ou tout ce qu’on voudra – ne pouvant concevoir qu’une chasse de nécessité…

Et quant à ces notables qui veulent toujours manger de l’Ortolan, qu’ils s’en étranglent…


  



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(1)   Voir les tonnes de plomb déversés dans la nature : https://www.liberation.fr/france/2019/02/14/chasse-le-plomb-un-poison-pour-l-homme-et-l-environnement_1704800

(2)   Je ne pensais pas voir juste et qu’ils oseraient… Voir le slogan de 2018 : « Les chasseurs, premiers écologistes de France ? ».  https://www.notre-planete.info/actualites/1894-chasseurs-premiers-ecologistes-France

(3)    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/08/29/sur-1-1-million-de-chasseurs-moins-de-10-possedent-un-permis-national_5347594_4355770.html

(4)   http://magazin.epjt.fr/longform/lobby-chasse