La Bête innommable ferme la marche du gracieux troupeau, comme un cyclope bouffe.
Huit quolibets font sa parure, divisent sa folie.
La Bête rote dévotement dans l'air rustique.
Ses flancs bourrés et tombants sont douloureux, vont se vider de leur grossesse.
De son sabot à ses vaines défenses, elle est enveloppée de fétidité.
Ainsi m'apparaît dans la frise de Lascaux, mère fantastiquement déguisée,
La Sagesse aux yeux pleins de larmes.
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« Autrefois, la véritable naissance de l’art, l’époque à laquelle il avait pris le sens d’une éclosion miraculeuse de l’être humain, semblait beaucoup plus proche de nous. L’on parlait de miracle grec et c’était à partir de la Grèce que l’homme nous paraissait pleinement notre semblable. J’ai voulu souligner le fait que le moment de l’histoire le plus exactement miraculeux, le moment décisif, devait être reculé bien plus haut. Ce qui différencia l’homme de la bête a pris en effet pour nous la forme spectaculaire d’un miracle, mais ce n’est pas tellement du miracle grec que nous devrions désormais parler que du miracle de Lascaux. »
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[17000 - 20000 ans]
Grotte découverte en septembre 1940.
Les peintures et gravures de la grotte de Lascaux sont d’un âge
estimé entre environ 18 000 et 17 000 ans (période du Magdalénien ancien – quelques préhistoriens cependant, minoritaires, les estiment plus anciennes et les font remonter au Solutréen qui le précède, voire au Gravettien).
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« L’abbé Breuil a vu dans cet homme un mort « renversé sur le dos », devant le bison blessé perdant ses entrailles : le « mort », ithyphallique, est pourvu d’une tête très petite, « qui ressemble à celle d’un oiseau à bec droit » ».
Georges Bataille
« ….j’insiste dès maintenant sur un caractère indéniable de cet ensemble : la différence dans la représentation de l’homme et de la bête. Le bison lui-même relève il est vrai de cette sorte de figuration du réel à laquelle convient le nom de réalisme intellectuel. Par rapport à la plupart des figures animales de Lascaux, nous n’avons là que le schéma naïf et intelligible de la forme, non plus l’imitation fidèle, naturaliste, de l’apparence. Le bison néanmoins semble naturaliste en face de l’homme, également schématique, mais outrancièrement maladroit, comparable aux simplifications des enfants. Beaucoup d’enfants traceraient l’analogue de l’homme, pas un n’atteindrait la vigueur et la force de suggestion de l’image du bison, qui exprime la fureur et la grandeur embarrassée de l’agonie.
Ainsi l’opposition paradoxale des représentations de l’homme et de l’animal nous apparaît-elle, dès l’abord, à Lascaux.
Dans leur ensemble, les figures humaines de l’Age du renne répondent en effet à cette séparation profonde, comme si, par un esprit de système, l’homme avait été préservé d’un naturalisme, qui atteignait, s’il s’agissait de l’animal, une perfection qui laisse confondu. »
Lascaux ou la naissance de l’art
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