« …. Qui
a jamais cuidé avoir faute de sens ? Ce serait une proposition qui
impliquerait en soi une contradiction : c’est une maladie, qui n’est
jamais où elle se voit : elle est bien tenace et forte, mais laquelle
pourtant, le premier rayon de la vue du patient, perce et dissipe : comme
le regard du soleil un brouillard opaque. »[1]
Ce qui fera sans doute dire à Descartes que la
chose la mieux partagée au monde est le bon sens. Je serai incapable de me
déterminer de savoir s’il faut prendre la saillie au sens littéral, ou si une
pointe d’humour - ou de lucidité – flotte entre les mots. Mais il est vrai que le
délire, l’extrême crédulité, l’acte le plus insensé, ont chacun leur logique –
la rationalité de la folie, dirons-nous…
D’où reprendre avec Montaigne : « Je pense avoir les opinions bonnes et
saines, mais qui n’en croit autant des siennes ? » Le doute est
ici salutaire. De sorte que le plus grand péril est de se retrouver face à un véridique
convaincu, un croyant dur et ferme, un engagé sûr de sa cause, un faiseur de
système… Le remède est ici à chercher encore du côté du périgourdin :
« Les contradictions
donc des jugements, ne m’offensent, ni m’altèrent : elles m’éveillent
seulement et m’exercent. Nous fuyons la correction, il s’y faudrait présenter
et produire notamment quand elle vient par forme de conférence, non de régence.
A chaque opposition, on ne regarde pas si elle est juste ; mais, à tort,
ou à droit, comment on s’en défera. Au lieu d’y tendre les bras, nous y tendons
les griffes (…) »[2] Et d’en
enfoncer le clou : « Quand on
me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère : je m’avance
vers celui qui me contredit, qui m’instruit. La cause de la vérité, devrait
être la cause commune à l’un et à l’autre ».
Quoi qu’il en soit, Régis Debray prendra la phrase
au sérieux, pour mieux la tordre et constater que la chose au monde la mieux
partagée, ce n’est pas le bon sens, mais l’ethnocentrisme… On ne peut pas tout
à fait lui donner tort.
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