J’ai déjà ici évoqué largement le
goût qu’il peut y avoir à se perdre parmi les ruines et vestiges des époques
effondrées. Invitation à la modestie que ces vastes cimetières, ou il
arrive de croiser, égaré face à la mer au milieu des débris, tel Prométhée enchainé, le buste en marbre d’un
dignitaire au nom disparu depuis des dizaines de siècles…
Mais si les squelettes de pierres
des époques reculées fascinent, d’aucuns nourrissent de même une appétence
particulière pour les cadavres des époques plus récentes. Ainsi, par exemple,
les restes de l’époque industrielle. Ces « abandonned places » de béton aux peintures dévalées, envahies
par la végétation ; ronces et herbes folles.
Y émergent des plaques de métal
tordu, mangées de rouille. Des fils de fer, des machines expirées, des rouages enraillés dont on peine à imaginer
parfois la fonction… On se dit, il n’y a pas si longtemps de cela, que des
êtres humains se courbaient là quotidiennement, à accomplir d’obscures tâches
devenues aujourd’hui inutiles.
Ces usines et autres fabriques, fleurons
d’une modernité déjà dépassé, se rencontrent au hasard de nos pérégrinations,
souvent dans les friches industrielles en périphérie des villes, mais parfois
isolées, au détour d’un village. Elles gisent impassibles et silencieuses, oubliées,
attendant la destruction ou, plus improbable, un recyclage, une réhabilitation…
A s’y promener, nulle crainte d’y
croiser encore de touristes (mais cela viendra sans aucun doute - certains vont bien rôder autour du cadavre
de Tchernobyl). Tout au plus un squatteur
ou quelques jeunes en quête de frissons ou d’aventure…
On the road (Photo par Axel) |
Plus inattendu est de croiser ce
genre de ruines au milieu de nulle part, en pleine nature… Ainsi cette « silk factory », située
tout au sud de l’île de Rhodes, sur un chemin de terre, pas très loin de la
route de Κατταβιά, dans un paysage de landes… Une petite fabrique cernée par
les oiseaux, perdue dans le silence. Le lieu est aujourd’hui annoncée par un
panneau situé au bord de la route principal, le signe manifeste d’un changement
de perceptions, la sourde conscience d’un patrimoine en devenir… A quand les
bus des tours operators ? Mais pour l’heure il est loisible encore de
jouir des gravats en solitaire, d’y rêver sans être dérangé, d’y découvrir les
restes d’une humanité affairée. L’empreinte du temps qui passe… L’extinction
des feux avant le grand chambardement climatique.
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