Blogue Axel Evigiran

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La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


4 juin 2018

A Belœil, dans les jardins et la bibliothèque du Prince de Ligne



Billet initial du 23 mai 2013
(Billet initial supprimé de la plateforme overblog, infestée désormais de publicité)

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Entrée du château de Beloeil (phot par Axel)
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Dans la préface de son beau recueil,  Trésor des moralistes du XVIIIe siècle, Cyril Le Meur, suggère un séjour près de Mons en Belgique, à Beloeil, fief de la famille du Prince de Ligne : 

« Beloeil est l’un des plus beaux jardins-paysages d’Europe ; il mêle le style français classique, et le style anglais à la mode dans la seconde moitié du XVIIIe siècle ». 

Nous avons suivi son conseil.

Voici le compte rendu en image de cette balade d’un samedi de mai, sous un ciel chargé – ce qui aura eu mérite de dissuader cohortes de fâcheux d’envahir le parc. 


Dans le parc de Beloeil (Photo par Axel)
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Beloeil (photo par Axel)
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« La vie que je menais à on cher Belœil, où des guerres, des voyages et d’autres plaisirs m’empêchaient d’être autant que je l’eusse voulu, était fort heureuse. J’allais lire sans être presque habillé dans mon île de Flore, où mon bateau volant retiré me sauvait des importuns, et d’où j’allais à mes ouvriers. Je revenais me baigner dans mes jolis bains, à côté de ma chambre. Je me couchais et me rendormais, ou écrivais dans mon lit, à l’ordinaire jusqu’à trois heures et demie que je dînais avec une douzaine d’officiers de mon régiment. »

« Deux femmes d’esprit, et de bonté et d’instruction, qui sont ici, à force d’avoir lu Chateaubriand - Le génie du christianisme -, pourraient intituler leur conversation La rage du christianisme ».  

Vue du château depuis le fond du parc (photo par Axel)
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« Je n’ai rien vu de plus heureux que le temps de mon enfance, et jusqu’à l’époque de la révolution flamande, à Belœil. Chansons de jeunes filles à leurs portes, des gardeurs de troupeaux dans les bruyères, de jeunes soldats en semestre, des faneuses, des chasseurs. Rondes, danses au-dessus et au-dessous d’une corde. Feux de Saint-Jean. Couronnes et guirlandes dans les rues. (…) Vingt bateaux sur mon étang. Joutes et combats qui s’y faisaient pour se jeter dans l’eau. Tocsin sur les loups. Affût aux lapins. Chaque jour de Belœil et surtout de mon sauvage Baudour était une journée de fêtes ». 

« Montaigne ne s’est pas douté de sa profondeur et de la finesse de ses observations. Je suis pour lui comme Condé pour Turenne. Que ne donnerai-je pas, disait-il, pour causer une heure avec lui ? Montaigne était, à l’orgueil près, tout le Portique d’Athènes à la fois. On voit partout le bon homme, le bon cœur, la bonne tête. Il a deviné le monde ; il a vu le passé, le présent l’avenir, sans se croire un grand sorcier ».


Dans la bibliothèque du Prince de Ligne (Photo par Axel)
« Voltaire, l’homme que j’admire le plus, a prononcé trois ou quatre grande vérités. HoraceBeloeil - 2013 05-004 en a dit une couple ; Ovide n’en a pas dit, ni Virgile non plus. Lucrèce en a cherché et n’en a pas rencontré. Les deux Rousseau en ont embelli ou dénaturé, l’un en beaux vers, l’autre en belle prose. Voilà à peu près cependant tous les instituteurs du genre humain. Les deux hommes qui n’ont pas prétendu à cet honneur, sont les deux seuls véritables : c’est La Fontaine et Montaigne. C’est chez eux que vous trouverez le plus de vrai et de neuf, retourné de mille façons différentes par les prétendus précepteurs de nos jours ». 


Escalier d'entrée de Beloeil (photo par Axel)
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Buste de Molière (photo par Axel)
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« Molière est moraliste, Regnard n’est que moqueur ». 

N’ayant pu résister à la tentation, nous sommes évidement ressortis du château avec des livres :


« Prince rose, enchanteur de l’Europe, prince chéri : jamais les qualificatifs flatteurs ne firent défaut à celui que Goethe appelait « l’homme le plus gai de son temps », dont les Contes immoraux sont les confessions librement transposées.
Au fil de ses amours, qui de ville d’eau en ville d’eau, entraînent le lecteur au travers de l’Europe, l’auteur observe ses semblables et le monde avec un détachement sarcastique. La légèreté d’esprit et de ton du récit recouvre une conception dédramatisée, tolérante de l’amour, aussi éloignée des émotions des « âmes sensibles » que du cynisme des libertins de Laclos : c’est l’œuvre d’un homme pour lequel le sentiment amoureux aura en définitive compté plus que tout » 
Quatrième de couverture

Afin de faire bonne figure avons aussi mis en notre panier de bons mots ce petit recueil sorti chez Arléa.

« Aphorismes, pensées & fragments » reprend un extrait des sélections de Madame de Staël (pensées), « sans retenir la sélection des lettres du prince, mais en y ajoutant un large choix tiré des Fragments de l’histoire de ma vie, que Charles-Joseph de Ligne appelait « mes posthumes », et qui ne furent publiés qu’en 1928 ». 

Extrait de la préface de Madame de Staël :
« … il y a toujours de l’esprit et de l’originalité dans tout ce qui vient de lui ; mais son style est souvent du style parlé, si on peut s’exprimer ainsi. Il faut se représenter l’expression de sa belle physionomie, la gaieté caractéristique de ses contes, la simplicité avec laquelle il s’abandonne à la plaisanterie, pour aimer jusqu’aux négligences de sa manière d’écrire.
Mais ceux qui ne sont pas sous le charme de sa présence analysent comme un auteur celui qu’il faut écouter en le lisant ; car les défauts mêmes de son style sont une grâce dans sa conversation. Ce qui n’est pas toujours bien clair grammaticalement le devient par l’à-propos de la conversation, la finesse du regard, l’inflexion de la voix…. »

« On dit : si cet homme qui remplit si bien sa place vient à mourir, comment fera-t-on ? Il est remplacé, et cela va. On dit : si nous ne faisons pas telle chose cette année, qu’est-ce qui arrivera ? rien. Si tel changement n’a pas lieu dans l’administration, tout est perdu. Non, tout s’en tire. Il faut faire, et faire faire à chacun son devoir. Et quand on le fait pas, cela revient encore à peu près au même ». 
















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