Billet initial du 9 octobre 2013
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Malgré mon peu d’appétence pour
le cubisme - ou précisément à cause de cette réserve instinctive envers les
créations des ‘géomètres’ du début du siècle dernier - il m’a pris l’idée de
pousser la porte du LAM où se tient actuellement une exposition temporaire «
Picasso, Léger, Masson ».
Si cette visite n’oblitéra pas ma
répugnance ordinaire envers ce mouvement artistique, ne sauvant du naufrage des
œuvres présentées qu’une poignée de compositions, elle m’aura à tout le moins
offert la possibilité de découvrir une autre mise en scène provisoire, à mes
yeux beaucoup plus intéressante, intitulée « Corps subtil », encore dénommée :
« Un panorama de l’art brut et collection indienne de Philippe Mons ».
De l’exposition « Picasso, Léger,
Masson » je n’ai aucune image, les photographies y étant interdites - ce qui
est idiot (passant, je ne vois d’ailleurs pas ce qu’il y avait à immortaliser
sur les cimaises). Par contre, de ces « Corps subtils » il me fut
loisible de capturer quelques spécimens.
Aussi, plutôt que jaser autour d’œuvres
dont je n’ai rien à dire de fondamentalement passionnant, ou de broder autour
des documents remis lors de l’exposition, ai-je pensé que mieux valait laisser
à l’appréciation de chacun les charmes de l’art indien.
Une anecdote enfin, traduisant
l’éternel ridicule de la cohorte de ceux qui cherchent à briller par
procuration au travers de la notoriété (réelle ou supposée) d’autrui ;
suivisme allant parfois jusqu’à la dévotion.
Alors que nous déambulions parmi
les œuvres indiennes, un groupe compact déboula soudain. La troupe bruissait de
mille chuchotements, prise de mouvements pareils à celui d’une colonie
d’étourneaux en vol, signe manifeste d’une petite foule en émoi.
Nous crûmes tout d’abord à une
banale visite guidée. Mais fûmes aussitôt détrompés. « C’est Philippe Mons »,
entendîmes-nous murmurer. « Oui, oui c’est lui… », « Oh c’est bien lui ! ».
Diantre ! Et à chaque exclamation le groupe des suiveurs croissait et croassait
jusqu’à la limite de l’apoplexie.
Le maître, un petit bonhomme au
crâne glabre arborant sur le torse un gros médaillon (son troisième œil sans
doute), était un septuagénaire bien mûr (on ne dit plus ‘vieux’). Faussement
indifférent à cette agitation causée par sa simple présence, sonotone arrimé à
l’oreille il trimballait ainsi la troupe extasiée de ses admirateurs d’œuvre en
œuvre, lâchant un mot ultime ici, une remarque essentielle là. Parole aussitôt
bue par les dévots. Parmi les mieux lotis de cette cour, une indienne à la
plastique avantageuse en minijupe. Et autour de ce centre (axis mundi), le
cercle étroit des « intimes », tâchant de faire au mieux écran à la plèbe.
Demeurés à une distance de
sécurité honnête, nous laissâmes ainsi passer le cortège du co-fondateur, en
1969, du SMAK (Signalétique Marginal d’Art Circonstanciel et kaléidoscopique)
et accessoirement maître yogi, et attendîmes que s’estompent ces ronds dans
l’onde du néant avant de poursuivre notre odyssée.
C’est de la sorte que nous
reprîmes nos pérégrinations oisives, conservant au coin d’œil une pensée émue
pour le principe bouddhiste de l’impermanence.
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