Blogue Axel Evigiran

Blogue Axel Evigiran
La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


11 oct. 2013

Frida Kahlo

« Je n’avais jamais pensé à la peinture avant 1926, quand j’ai dû rester alitée suite à un accident de la route. Je m’ennuyais beaucoup dans mon lit, (…) alors j’ai décidé de faire quelque chose. J’ai chipé de la peinture à l’huile à mon père et ma mère m’a fait fabriquer un chevalet spécial, parce que je ne pouvais pas m’asseoir. Voilà comment j’ai commencé à peindre ».


Lettre à Nickolas Murray, 1939

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Frida Kahlo - The love embrace of the universe - the earth Mexico - Myself Diego and señor Xólotl - 1949

« La relation duelle entre l'homme et la femme trouvent leur correspondance dans la relation amoureuse entre le soleil et luna. 
Cela est illustré par l'étreinte amoureuse de l'univers, par le chien Itzcuintli, représentant le seigneur Xólotl, accroupi au pied du couple.
Cette étreinte n'est pas seulement un refuge pour le petit animal du peintre. Il représente, dans le même temps, une figure important de l'ancienne mythologie, le chien mexicain nommé Xolotl qui sauve le monde des morts.... 

On retrouve ici le double principe de la mythologie préhispanique : la vie et la mort participent ensemble à l'harmonie du monde et à celle de l'artiste. »

Andrea Kettenmann

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Frida Kahlo
[1907 - 1954]

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Frida Kahlo - A few small nips passionately in love - 1935
Frida Kahlo - Diego and I - 1949
Frida Kahlo - Flower of life flame flower - 1943
Frida Kahlo - Girl with death mask - she plays alone - 1938
Frida Kahlo - Henry Ford hospital - the flying bed - 1932
Frida Kahlo - Me and my parrots - 1941
Frida Kahlo - Moses - 1945
Frida Kahlo - My dress hangs there - 1933
Frida Kahlo - My grandparents my parents and me - 1936
Frida Kahlo - Portrait of Alicia Galant - 1927
Frida Kahlo - Portrait of Cristina my sister - 1928
Frida Kahlo - Portrait of Diego Rivera - 1937
Frida Kahlo - Portrait of Dona Rosita Morillo - 1944
Frida Kahlo - Portrait of Luther Burbank - 1931
Frida kahlo - Self-portrait - 1930
Frida Kahlo - Self portait very ugly - 1933
Frida Kahlo - Self-portrait dedicated tom Leon Trotsky - between the curtains - 1937
Frida Kahlo - Self-portrait in a velvet dress - 1926
Frida Kahlo - Self-portrait with a monkey - 1938

Frida Kahlo - Self-portrait with cropped hair - 1940
Frida Kahlo - Self-portrait with monkey - 1940
Frida Kahlo - Self-portrait with necklace of thorns - 1940
Frida Kahlo - Self-portrait with the portrait of doctor Farill - 1951
Frida Kahlo - Sel-portrait with loos hair - 1947
Frida Kahlo - The broken column - 1944
Frida Kahlo - The dream - 1940
Frida Kahlo - The suicide of Dorothy Hale - 1938
Frida Kahlo - The Two Fridas - 1939
Frida Kahlo - Tree of hope - remain strong - 1946
Frida Kahlo - Two nudes in the forest - the earth itself - 1939
Frida Kahlo - What the Water Gave Me - 1938
Frida Kahlo - Without hope - 1945

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Corrido pour A. et L. 1

Mai 1946

Tout seul allait le petit Cerf
triste, à l’abandon, blessé
mais chez Arcady et Lina
il put enfin se réfugier

Quand le Cerf s’en reviendra
requinqué, joyeux, soulagé,
les blessures de son corps meurtri
enfin auront été gommées

Merci, mes enfants bien-aimés, 
de tout cœur, pour votre appui
Dans la forêt qu’habite le Cerf
enfin le ciel s’est éclairci

Coyoacan, vendredi 3 mai 1946

Acceptez ci-joint mon portrait
pour que toujours je sois présente,
tous les jours et toutes les nuits, 
même quand je serai absente. 

La tristesse est reflétée 
dans chaque recoin de mes tableaux, 
je ne vois pas la moindre issue
car c’est bel et bien mon lot. 

Inversement, le bonheur
est dedans mon cœur enfoui
grâce à Arcady et Lina
parce qu’ils m’aiment telle que je suis. 

Je vous offre cette peinture
réalisée avec tendresse
en échange de votre amour
et de votre gentillesse.


Frida


Frida Kahlo - The little deer - 1946
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« Ils pensaient que j'étais une surréaliste, mais je ne l'étais pas.
Je n'ai jamais peint de rêves, j'ai peint ma réalité. »


Frida Kahlo 


Frida Kahlo on a boat in Xochimilco, one of The Coolest Places in Mexico City, 1936, photo by Fritz Henle
 Frida Kahlo par Julien Levy, New York, 1938
Frida Kahlo on her bed
Frida Kahlo - 1939 - Par Nickolas Muray
Frida Kahlo - Xochimilco, Mexico City, photo by Fritz Henle, 1936
« Tu ne peux pas imaginer combien ces gens sont des fils de pute. Ils me font vomir. Ils sont si foutûment ‘intellectuels’ et dépravés que je ne peux vraiment pas les supporter plus longtemps. (…) Cela valait la peine de venir jusqu’ici rien que pour voir pourquoi l’Europe pourrit et que tous ces bons à rien sont la cause de tous les Hitlers et Mussolinis. Je donnerais ma tête à couper qu’aussi longtemps que je vivrai je haïrai cet endroit et ses habitants ».

Frida Kahlo
Lettre à Nickolas Murray, 1939

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QUELQUES LIENS

La palette et le rêve : Frida Kahlo
Site Frida Kahlo (anglais)
Frida Kalho foundation
Viva Mexico : Frida Kahlo
Frida Kahlo et les surréalistes
Autour des correspondances de Frida Kalho
Jadis et naguère, Frida Kahlo

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Xochimilco, Mexico City en 2012


5 oct. 2013

Odilon Redon

« Lorsque je produisais autrefois des dessins et des lithographies, et que je publiais celles-ci, j’ai reçu bien des fois des lettres d’inconnus me disant leur attachement à cet art, et me révélant une émotion exaltée. Un d’eux m’avouait avoir été touché jusqu’aux sentiments religieux et en avoir reçu la foi. Je ne sais si l’art a de tels pouvoirs ; mais j’ai dû, dès lors, envisager moi-même avec plus d’égards certains de mes travaux, et particulièrement ceux que j’exécutais naguère à des heures de tristesse, de douleur, et pour cette raison-là plus expressifs sans doute. La tristesse, quand elle est sans cause, est peut-être une ferveur secrète, une sorte d’oraison que l’on dirait, confusément, pour quelque office, dans l’inconnu. »

Paru dans À soi-même, notes sur la vie, l’art et les artistes, Paris, Floury, 1922, p. 118-119.

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Odilon Redon - Christ avec des épines rouges - 1897
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Odilon Redon

[1840 - 1916]

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« L'étude de femme, que vous appelez si justement la déesse de l'Intelligible, nous sort à regret du cauchemar ;  mais mon admiration toute entière va droit au grand Mage inconsolable et obstiné chercheur d'un mystère qu'il sait ne pas exister, et qu'il poursuivra, à jamais pour cela, du deuil de son lucide désespoir, car c'eût été la Vérité !  Je ne connais pas un dessin qui communique tant de peur intellectuelle et de sympathie affreuse, que ce grandiose visage. (...) »


S. Mallarmé 
Lettre du 2 février 1885 à  Odilon Redon, in Lettres à O. Redon



Odilon Redon - Bateau avec deux personnages - 1908
Odilon Redon - Bazon, le chat de l'artiste - 1905
Odilon Redon - Bouddha marchant parmi les fleurs - 1905
Odilon Redon - Chimère - 1882
Odilon Redon - Christe en silence
Odilon Redon - Cœur révélateur - 1883
Odilon Redon - Cyclope
Odilon Redon - Death : My irony surpasses all others - 1889
Odilon Redon - Eléonore -1882
Odilon Redon - Esprit de la forêt - 1890
Odilon Redon - Femme avec un voile - 1895
Odilon Redon - Femme et Centaure
Odilon Redon - Fleur du marécage - 1884-85
Odilon Redon - Fleur de sang - 1905
Odilon Redon - Folie - 1883
Odilon Redon - Hommage à Gauguin - 1903-04
Odilon Redon - Homme cactus
Odilon Redon - Jeanne d'Arc
Odilon Redon - La cape jaune - 1895
Odilon Redon - L'araignée pleurant - 1881
Odilon Redon - L'araignée qui sourit - 1891
Odilon Redon - Le bateau mystérieux
Odilon Redon - Le bouddha - 1905
Odilon Redon - Le char d'Apollon - 1914
Odilon Redon - Le liseur - 1894
Odilon Redon - Le masque de la mort rouge - 1883
Odilon Redon - Le silence éternel des espaces infinis m'effraie - 1870
Odilon Redon - L’œil-ballon - 1878
Odilon Redon - Parsifal - 1912
Odilon Redon - Paysage - 1881
Odilon Redon - Paysage vénitien - 1908-09
Odilon Redon - Perversité - 1891
Odilon Redon - Portrait de Madame Redon - 1880
Odilon Redon - Portrait de Marie Botkine - 1900
Odilon Redon - Tête de martyr - 1894
Odilon Redon - Tête de mort
Odilon Redon - Yeux clos - 1894
Odilon Redon - La druidesse - 1893
Odilon Redon - ???

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« Ce fut tout d'abord une énigmatique figure, douloureuse et hautaine qui surgit des ténèbres, çà et là percées par des rais de jour :  — une tête de mage de la Chaldée, de roi d'Assyrie, de vieux Sennacherib ressuscité, regardant, désolé et pensif, couler le fleuve des âges, le fleuve toujours grossi par les emphatiques flots de la sottise humaine. 
Il pose sur ses lèvres une main fine et maigre, semblable à la main d'une petite infante, et il  ouvre un œil où semblent passer les éternelles douleurs qui se transmettent et se répercutent dans l'âme des couples, depuis la Genèse. Est-ce le primitif pasteur d'hommes contemplant le défilé des immortels troupeaux qui se bousculent et se massacrent pour une touffe d'herbe ou un bout de pain ? — Est-ce la figure de l'immémoriale Mélancolie qui convient enfin, devant l'impuissance avérée de la Joie, de l'inutilité absolue de toute chose ? — Est-ce enfin le mythe, une fois de plus rajeuni, de la Vérité qui reconnaît, au passage, sous des oripeaux et des masques divers, le même homme, affligé des mêmes vertus et des mêmes vices ;  le même homme, dont l'originelle férocité ne s'est nullement amoindrie sous l'effort des siècles, mais s'est simplement dissimulée derrière cette grâce des peuples civilisés, la pénétrante et discrète hypocrisie ? 
Quoi qu'il en soit, ce mystérieux visage me hantait ; en vain je voulus scruter son regard perdu au loin ;  en vain
je tentai de sonder son auguste face qu'une souffrance seulement personnelle eût été incapable de creuser ainsi ; 
mais la hiératique et douloureuse image disparut, et, à cette moderne vision des anciens âges, succéda un paysage atroce, un marais d'eau stagnante, morne et noire ;  (...) »  



J.-K. Huysmans, Le nouvel Album d'Odilon Redon, La Revue indépendante ,  fév.  1885, pp. 291-296.



Odilon Redon - Autoportrait - 1910

« L'artiste vient à la vie pour un accomplissement qui est mystérieux. Il est un accident. Rien ne l’attend dans le monde social. » 


(Odilon Redon, "Journal, 1867-1915 : notes sur la vie, l'art et les artistes")

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Odilon Redon - Tête de profil à gauche avec un pot de fleur

En travers à gauche, brouillon d'un poème au crayon noir :

"La brise était sereine moins que la nature / les hautes (barré) herbes hautes (ces deux lignes sont barrées) / Le ciel était serein, sans bruit et sans murmure, / Les fleurs les prés (dans les herbes hautes, barré), / au bord du lac silencieux / Exhalaient leur parfum troublant, et la nature / ainsi qu'un Dogme immuable, mystérieux, / Chantait son hymne étrange, par les cieux. / Mon âme était inquiète et / J'écoutais les accords (ces deux lignes sont barrées) / Je tentais un accord- l'écart était sublime (barré) / mon âme était infime / et si loin, si peu de chose..."


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Odilon Redon - Des Esseintes, Frontispiece for A Rebours by J.K. Huysmans - 1888

« M. Odilon Redon, dont j’ai déjà dit quelques mots, l'année dernière, exposait toute une série de lithographies et de dessins. Il y avait là des planches agitées, des visions hallucinées inconcevables, des batailles d’ossements, des figures étranges, des faces en poires tapées et en cônes, des têtes avec des crânes sans cervelets, des mentons fuyants, des fronts bas, se joignant directement au nez, puis des yeux immenses, des yeux fous, jaillissant de visages humains, déformés, comme dans des verres de bouteille, par le cauchemar. Toute une série de planches intitulées le rêve prenait, au milieu de cette fantaisie macabre, une intensité troublante, une, entre autres, représentant une sorte de clown, à l’occiput en pain de sucre, une sorte d’Anglais félin, une sorte de Méphisto simiesque, tortillé, assis, près d’une gigantesque figure de femme qui le fixe, le magnétise presque, de ses grands yeux d’un noir profond, sans qu’un mot semble s’échanger entre ces deux énigmatiques personnages. Puis des fusains partaient plus avant encore dans l’effroi des rêves tourmentés par la congestion ; ici c’étaient des vibrions et des volvoces, les animalcules du vinaigre qui grouillaient dans de la glucose teintée de suie ; là, un cube où palpitait une paupière morne ; là encore, un site désert, aride, désolé, pareil aux paysages des cartes sélénographiques, au milieu duquel une tige se dressait supportant comme une hostie, comme une fleur ronde, une face exsangue, aux traits pensifs. »


Art moderne -  J.-K. Huysmans - Exposition indépendants de 1881

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QUELQUES LIENS

Odilon Redon et la critique
La place du rêve dans l'œuvre d'Odilon Redon