Ce
premier épisode introduit brièvement la chronique des mes aventures dans le
monde déroutant de la maladie de Lyme – mi mai à mi septembre 2024
Tout a commencé
mi-mai, un jeudi après-midi …
En milieu
d’après-midi je constate que deux doigts de ma main gauche tremblent
terriblement sur les touches de mon clavier (annulaire / auriculaire). Je pense
à une passagère fatigue. Mais cela persiste et je sens une lourdeur dans le
bras gauche. Je m’inquiète un peu mais pense que ça va passer – la sensation ne
serait-elle pas subjective ? Le fruit de mon imagination perturbée ?
Je grimace dans mon miroir. Et ce dernier de me renvoyer à mes doutes. Mais
vendredi matin, alors que je me rends à pied au travail, une marche de 40
minutes d'un pas tranquille, je me sens très fatigué et nauséeux – je transpire
abondamment alors qu'il ne fait pas particulièrement chaud. Ma vue semble
altérée, comme si je regardais au travers la vitre d'un bocal. La matinée est
compliquée … Le week-end j'ai prévu de me rendre en baie de Somme, une route de
deux heures que je me sens de moins en moins capable de faire !
Samedi, tôt le matin,
avant de partir vers le Crotoy je m'en vais consulter ma généraliste qui
m’envoie aux urgences du CHR de Lille, craignant un début d'AVC ou un AIT. J’y
passe la journée, un jour sans lumière sous les néons d’une agitation
fiévreuse. Côtoyer d’autres patients relève de l’épreuve ; une épreuve
procurant à la fois un réconfort et tourment – A la façon du « « suave
mari magno aequora ventis…» de Lucrèce ; tant il est vrai qu'il est
quelque part apaisant d'être confronté à un malheur pire que le nôtre. Un jour entier où on me
fait des analyses de sang détaillées (pas moins de neuf fioles de
prélèvements), deux examens neurologiques, un électrocardiogramme et enfin une
IRM cérébrale avec injection. Résultat tout est ok. C’est rassurant, n’empêche
que mes symptômes persistent.
Je passe une semaine
ainsi en forme très moyenne, puis, soudain, je prends conscience avoir attrapé
des acouphènes permanents dans les deux oreilles. Ils sont forts et
traumatisants empêchant la concentration et le sommeil (c’est à se claquer la
tête contre les murs). Il me faut d'ailleurs un certain temps conscientiser
qu'il s'agit d’acouphènes, pensant tout d'abord que mon cerveau
« grésille » ! (Mettre un mot sur un phénomène de ce genre, peut
être problématique). En même temps je constate l’arrêt du transit, des
problèmes gastriques intenses. Je retourne chez ma généraliste qui attribue ces
symptômes forts disparates possiblement au stress subit lors de mon séjour aux
urgences. J’y crois moyen, mais en même temps, comme mes tremblements
persistent et s’aggravent elle me fait prendre RDV pour réaliser une IRM
médullaire (colonne vertébrale et détecter d’éventuelles maladie
neurodégénératives), un EMG des membres supérieurs (détection des maladies
neuromusculaires).
Malheureusement après
une journée de recherche, les premiers RDV possibles ne sont au plus tôt
qu’entre mi et fin juillet !
Entre temps mes
symptômes s’aggravent : fourmillements intermittents sous la voûte
plantaire. Tremblement et faiblesse de la jambes gauche, douleurs dorsales à
divers endroits (même assis). Impossible de me concentrer sur quoi que ce soit,
plus d’énergie, nombreux vertiges, baisses et augmentation brutales de la
tension artérielle. Je ne supporte plus la chaleur (à 25°C j’ai l’impression de
cuire et étouffer). Tout me parait insurmontable (le moindre courriel, la
moindre tâche), je me sens perdre pied et je ne n'arrive à dormir que très peu
(2 à 3 heures par nuit et en fragmenté). Crises d’angoisse. Je vois durant le
mois de juin ma généraliste au moins 7 ou 8 fois. Je perds 10 kg. Je dois
prendre des anxiolytiques et suis mis sous antidépresseur. Ainsi passent les
jours et mois de juin ...
Début juillet les
crises s’aggravent avec des douleurs intenses, des fourmillements et des
brûlures violentes à l’intérieur de tout mon corps. Crises de désespoir. Moi
qui aime tant la vie, sous le coup de la douleur et des insomnies je nourris
des idées morbides pour ne pas dire plus ! Il faut me conduire chez la
doctoresse (je n’y arrive alors plus). Elle m’envoie cette fois aux urgences de
Saint-Vincent à Lille (merci à elle). J'y suis hospitalisé 24h et on me fait à
nouveau des examens neurologiques ainsi que le tant espéré IRM médullaire qui
se révèle normal. Retour chez la généraliste et mi-juillet et il est fait une
sérologie pour détecter si cela ne serait pas la maladie Lyme. Résultat tombe
après quelques jours : positif !
Ma généraliste réagit
aussitôt et me prescrit alors les antibiotiques de première intention
(Amoxicilline) à prendre trois semaines. Ça me stabilise un peu mais les
symptômes persistent. Cependant la maladie de Lyme reste difficile à
diagnostiquer avec certitude. Il faut confirmer le diagnostic par une ponction
lombaire. Entre temps j’ai eu la chance de rencontrer un neurologue de
Saint-Vincent qui, devant la persistance et aggravation des symptômes, me
propose fin juillet de la faire. « Quand », lui demandé-je.
« C'est possible demain », répond-il.
En découle une
semaine et demie d’hospitalisation début août à Saint-Vincent. Ponction
lombaire avec effets secondaires et cervicalgie violente qui nécessite une
intervention chirurgicale (blood patch). Je passe à Saint-Vincent également par
l’ORL qui ne détecte rien d’anormal au niveau des conduits auditifs. Il faut du
temps pour analyser la ponction lombaire. Le résultat tombe enfin une
dizaine de jours plus tard : Maladie de Lyme confirmée !
Au moins je sais
désormais ce dont il s’agit (ce n’était pas du stress !) Je passe donc le
7 août sur le traitement antibiotique de choc : la Doxycycline (en double
dose matin et soir). L’effet est immédiat et impressionnant. La forme revient et
les douleurs disparaissent en quelques jours et en l’espace d’une semaine
plusieurs de mes signaux passent au vert. Il me reste juste les tremblements
des doigts de la main gauche, les acouphènes que je ressens tout de même moins
fortement et parfois des vertiges.
Je dors mieux, me
réveille plus en forme, je supporte bien la chaleur, je peux faire des
randonnées, me concentrer, etc.
Je me sens
revivre ! Je pense alors être tiré d’affaire !
Hélas la semaine
suivante est plus contrastée, peu à peu les acouphènes reviennent plus fort, la
fatigue est plus nette, et j’attrape de grosses rougeurs au visage et aux
mains. Au fil des jours la douleur aux mains devient plus intense, intenable.
Comme une énorme brûlure. Le moral baisse …
Mon traitement de trois
semaines à la Doxycycline pratiquement achevé, je retourne chez la généraliste
pour apprendre que mes brûlures sont dues à un effet secondaire de
l’antibiotique extrêmement photosensible ! Je dois donc éviter tout
contact avec le soleil durant le temps de la cicatrisation (on ne m’avait pas
prévenu).
Et à ma question sur
le retour de mes symptômes et l’impression que la maladie se propage à nouveau,
alors que je n’ai plus le moindre traitement pour Lyme, ma médecin reconnaît
sincèrement ne pas trop savoir quoi faire, étant son premier cas déclaré en 25
ans d’exercice. A question de savoir si l’avis d’un infectiologue spécialiste
ne pourrait pas orienter vers de nouvelles pistes. La médecin d’approuver et de
me faire courrier très détaillé dans ce sens (résumant tout mon historique de
soins).
Désormais j’ai réussi
à avoir un RDV le 11 septembre au CHR DRON de Tourcoing avec un infectiologue
reconnu dans le domaine des maladies infectieuses. Je m’accroche à l’espoir
d’une nouvelle piste pour améliorer mon état. Car aujourd’hui je sens la maladie
se propager peu à peu et suis cloîtré chez moi sans force ni activité possible
avec pour compagnie mes douleurs, mes acouphènes, à subir les heures
interminables.
Mon moral oscille
entre ruminations, inquiétude, espoir, désespoir, résignation … Mais je ne
renonce pas et je croise les doigts pour que l’infectiologue parvienne à me
prescrire un traitement qui me permette de recouvrer une vie professionnelle et
sociale correctes.