Blogue Axel Evigiran

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La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


1 déc. 2024

ODYSSÉE EN NEUROBORRELIOSE, ou Lyme version 3.0 (chronique)

 

 

Ce premier épisode introduit brièvement la chronique des mes aventures dans le monde déroutant de la maladie de Lyme – mi mai à mi septembre 2024

 


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Tout a commencé mi-mai, un jeudi après-midi …

En milieu d’après-midi je constate que deux doigts de ma main gauche tremblent terriblement sur les touches de mon clavier (annulaire / auriculaire). Je pense à une passagère fatigue. Mais cela persiste et je sens une lourdeur dans le bras gauche. Je m’inquiète un peu mais pense que ça va passer – la sensation ne serait-elle pas subjective ? Le fruit de mon imagination perturbée ? Je grimace dans mon miroir. Et ce dernier de me renvoyer à mes doutes. Mais vendredi matin, alors que je me rends à pied au travail, une marche de 40 minutes d'un pas tranquille, je me sens très fatigué et nauséeux – je transpire abondamment alors qu'il ne fait pas particulièrement chaud. Ma vue semble altérée, comme si je regardais au travers la vitre d'un bocal. La matinée est compliquée … Le week-end j'ai prévu de me rendre en baie de Somme, une route de deux heures que je me sens de moins en moins capable de faire ! 

Samedi, tôt le matin, avant de partir vers le Crotoy je m'en vais consulter ma généraliste qui m’envoie aux urgences du CHR de Lille, craignant un début d'AVC ou un AIT. J’y passe la journée, un jour sans lumière sous les néons d’une agitation fiévreuse. Côtoyer d’autres patients relève de l’épreuve ; une épreuve procurant à la fois un réconfort et tourment – A la façon du « « suave mari magno aequora ventis…» de Lucrèce ; tant il est vrai qu'il est quelque part apaisant d'être confronté à un malheur  pire que le nôtre. Un jour entier où on me fait des analyses de sang détaillées (pas moins de neuf fioles de prélèvements), deux examens neurologiques, un électrocardiogramme et enfin une IRM cérébrale avec injection. Résultat tout est ok. C’est rassurant, n’empêche que mes symptômes persistent.

 

Je passe une semaine ainsi en forme très moyenne, puis, soudain, je prends conscience avoir attrapé des acouphènes permanents dans les deux oreilles. Ils sont forts et traumatisants empêchant la concentration et le sommeil (c’est à se claquer la tête contre les murs). Il me faut d'ailleurs un certain temps conscientiser qu'il s'agit d’acouphènes, pensant tout d'abord que mon cerveau « grésille » ! (Mettre un mot sur un phénomène de ce genre, peut être problématique). En même temps je constate l’arrêt du transit, des problèmes gastriques intenses. Je retourne chez ma généraliste qui attribue ces symptômes forts disparates possiblement au stress subit lors de mon séjour aux urgences. J’y crois moyen, mais en même temps, comme mes tremblements persistent et s’aggravent elle me fait prendre RDV pour réaliser une IRM médullaire (colonne vertébrale et détecter d’éventuelles maladie neurodégénératives), un EMG des membres supérieurs (détection des maladies neuromusculaires).

Malheureusement après une journée de recherche, les premiers RDV possibles ne sont au plus tôt qu’entre mi et fin juillet !

 

Entre temps mes symptômes s’aggravent : fourmillements intermittents sous la voûte plantaire. Tremblement et faiblesse de la jambes gauche, douleurs dorsales à divers endroits (même assis). Impossible de me concentrer sur quoi que ce soit, plus d’énergie, nombreux vertiges, baisses et augmentation brutales de la tension artérielle. Je ne supporte plus la chaleur (à 25°C j’ai l’impression de cuire et étouffer). Tout me parait insurmontable (le moindre courriel, la moindre tâche), je me sens perdre pied et je ne n'arrive à dormir que très peu (2 à 3 heures par nuit et en fragmenté). Crises d’angoisse. Je vois durant le mois de juin ma généraliste au moins 7 ou 8 fois. Je perds 10 kg. Je dois prendre des anxiolytiques et suis mis sous antidépresseur. Ainsi passent les jours et mois de juin ...

 

Début juillet les crises s’aggravent avec des douleurs intenses, des fourmillements et des brûlures violentes à l’intérieur de tout mon corps. Crises de désespoir. Moi qui aime tant la vie, sous le coup de la douleur et des insomnies je nourris des idées morbides pour ne pas dire plus ! Il faut me conduire chez la doctoresse (je n’y arrive alors plus). Elle m’envoie cette fois aux urgences de Saint-Vincent à Lille (merci à elle). J'y suis hospitalisé 24h et on me fait à nouveau des examens neurologiques ainsi que le tant espéré IRM médullaire qui se révèle normal. Retour chez la généraliste et mi-juillet et il est fait une sérologie pour détecter si cela ne serait pas la maladie Lyme. Résultat tombe après quelques jours : positif !

Ma généraliste réagit aussitôt et me prescrit alors les antibiotiques de première intention (Amoxicilline) à prendre trois semaines. Ça me stabilise un peu mais les symptômes persistent. Cependant la maladie de Lyme reste difficile à diagnostiquer avec certitude. Il faut confirmer le diagnostic par une ponction lombaire. Entre temps j’ai eu la chance de rencontrer un neurologue de Saint-Vincent qui, devant la persistance et aggravation des symptômes, me propose fin juillet de la faire. « Quand », lui demandé-je. « C'est possible demain », répond-il. 

 

En découle une semaine et demie d’hospitalisation début août à Saint-Vincent. Ponction lombaire avec effets secondaires et cervicalgie violente qui nécessite une intervention chirurgicale (blood patch). Je passe à Saint-Vincent également par l’ORL qui ne détecte rien d’anormal au niveau des conduits auditifs. Il faut du temps pour analyser la ponction lombaire. Le résultat tombe enfin une dizaine de jours plus tard : Maladie de Lyme confirmée !

 

Au moins je sais désormais ce dont il s’agit (ce n’était pas du stress !) Je passe donc le 7 août sur le traitement antibiotique de choc : la Doxycycline (en double dose matin et soir). L’effet est immédiat et impressionnant. La forme revient et les douleurs disparaissent en quelques jours et en l’espace d’une semaine plusieurs de mes signaux passent au vert. Il me reste juste les tremblements des doigts de la main gauche, les acouphènes que je ressens tout de même moins fortement et parfois des vertiges.

Je dors mieux, me réveille plus en forme, je supporte bien la chaleur, je peux faire des randonnées, me concentrer, etc.

Je me sens revivre ! Je pense alors être tiré d’affaire !

 

Hélas la semaine suivante est plus contrastée, peu à peu les acouphènes reviennent plus fort, la fatigue est plus nette, et j’attrape de grosses rougeurs au visage et aux mains. Au fil des jours la douleur aux mains devient plus intense, intenable. Comme une énorme brûlure. Le moral baisse …

 

Mon traitement de trois semaines à la Doxycycline pratiquement achevé, je retourne chez la généraliste pour apprendre que mes brûlures sont dues à un effet secondaire de l’antibiotique extrêmement photosensible ! Je dois donc éviter tout contact avec le soleil durant le temps de la cicatrisation (on ne m’avait pas prévenu).

Et à ma question sur le retour de mes symptômes et l’impression que la maladie se propage à nouveau, alors que je n’ai plus le moindre traitement pour Lyme, ma médecin reconnaît sincèrement ne pas trop savoir quoi faire, étant son premier cas déclaré en 25 ans d’exercice. A question de savoir si l’avis d’un infectiologue spécialiste ne pourrait pas orienter vers de nouvelles pistes. La médecin d’approuver et de me faire courrier très détaillé dans ce sens (résumant tout mon historique de soins).

 

Désormais j’ai réussi à avoir un RDV le 11 septembre au CHR DRON de Tourcoing avec un infectiologue reconnu dans le domaine des maladies infectieuses. Je m’accroche à l’espoir d’une nouvelle piste pour améliorer mon état. Car aujourd’hui je sens la maladie se propager peu à peu et suis cloîtré chez moi sans force ni activité possible avec pour compagnie mes douleurs, mes acouphènes, à subir les heures interminables.

Mon moral oscille entre ruminations, inquiétude, espoir, désespoir, résignation … Mais je ne renonce pas et je croise les doigts pour que l’infectiologue parvienne à me prescrire un traitement qui me permette de recouvrer une vie professionnelle et sociale correctes.




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